LP Review : Eagulls – Ullages (New New-Wave)

Eagulls est un groupe originaire de Leeds bien connu des lecteurs de Still in Rock et, plus généralement, de tout ceux qui s’intéressent de près ou de loin à la scène anglaise. Le groupe a été élevé au statut de star mondial par la presse anglaise et voilà que les feux des projecteurs sont désormais tournés vers lui. On connaît généralement la suite. Eagulls a fait paraître son nouvel album, Ullages, via Partisan Records le 13 mai dernier, et c’est là que tout se joue. 
Autant le dire, je n’attendais pas beaucoup de ce deuxième album d’Eagulls. Le groupe m’a déçu à plusieurs reprises en live ce qui annonce presque toujours un coup de chance en studio. Et puis, la musique du premier album était sur le fil. Enfin, Ullages a perdu l’aspect punk du premier album, et avec, le post-punk qui l’accompagnait. On se trouve ainsi confronté à de la véritable new wave. Vous n’aimez pas les Cure ? Passez votre chemin. Résultat de tout ça ? Ullages est en dessous du premier LP, sans conteste. Seulement, l’album contient quelques morceaux qui valent véritablement la peine et on se souvient qu’Eagulls nous avait tellement enchanté en 2014 qu’il convient d’assurer le suivi, au moins sur cet album. 
Il était crucial que le groupe commence de la meilleure des manières. C’est ce qu’il fait avec “Heads Or Tails“, un morceau captivant qui nous plonge immédiatement dans la brume de son premier album. George Mitchell n’a rien perdu de sa superbe, c’est déjà ça ! Et puis, Eagulls reprend ses thèmes favoris, le noir, la solitude et la dépression, comme pour nous saisir immédiatement à la gorge. Rien à dire, ce premier titre est une franche réussite. Le petit second, “Euphoria“, fait moins bien le travail. Les ficèles sont trop grosses et puis… trop pop. 
My Life In Rewind“, c’est les premiers pas d’Eagulls dans pop ambiante, un style qui va habiter une bonne partie de cet album. Eagulls n’y excelle pas, on manque déjà l’intensité du premier album. Et puis, on croirait rêver avec “Harpstrings“, non pas parce que le titre ressemble à la série Twin Peaks, mais bel et bien parce qu’il rappelle cruellement Alex Calder. Il ne s’agit en fait que d’une simple interlude qui nous conduit vers “Velvet“. Ce morceau-là, à mon sens le meilleur de l’album, parvient à faire le grand écart entre les deux styles du groupe : celui intense et post-punk du premier LP, celui plus new wave et plus soft pop du second. “Velvet” doit être retenu ! 

Malheureusement, Eagulls ne réussit pas toujours son coup et on tombe ensuite sur “Psalms“, sorte de bouillie dont on ressort peu satisfait. “Blume” est également trop mou, sans statement, sans objectif. “Skipping” est plus étonnant. Le titre alterne entre plusieurs univers, c’est suffisamment bien fait pour nous captiver, mais on se demande déjà ce qui suit. La réponse est “Lemontrees“, un autre morceau très new wave qui a l’avantage de son refrain. 
Aisles” perpétue la batterie militaire qui oscille sur l’album depuis plusieurs minutes. La guitare n’est pas vraiment présente pour contrebalancer le tout, encore un morceau qui glisse comme la pluie de ce 19 mai 2015. On conclut finalement sur “White Lie Lullabies“, un morceau tout aussi pop, un morceau aussi éloigné du post-punk un peu rageur du premier LP. Loin de moi l’idée de reprocher à Eagulls de n’avoir pas reproduit son album éponyme, mais il y avait peu être quelque chose de tout aussi saisissant à produire, même dans un style différent. 
Un groupe qui abandonne le rock’n’roll, c’est difficilement pardonnable. Eagulls profite toutefois de cet abandon pour renouer avec un genre musical en déperdition. C’est le seul véritable statement de cet album, celui de montrer que le groupe est capable de s’éloigner de la hype de son premier album pour tenter une nouvelle identité musicale. C’est osé, c’est fort et ce doit être remarqué.

Toutefois, on aurait préféré qu’Eagulls fasse quelque chose d’autre de son intention. Ullages est souvent mou et uniforme, les titres s’enchaînent parfois sans jamais nous accrocher l’oreille, c’est dommage (rien de comparable à “Amber Veins” et “Footsteps” par exemple). Eagulls fait partie de ces rares formations à apporter quelque chose de nouveau à la scène, alors forcément, on aurait aimé que cette nouveauté nous extasie un peu plus. Mais on ne gagne pas à tous les coups, j’imagine. Il faudra tout de même continuer de porter un regard bienveillant sur le groupe qui mérite la reconnaissance qui est la sienne. Et puis, Ullages a quand même du bon, voir très bon. Prenons-le et partons en courant nous réfugier dans une église de Leeds. 

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