Eagulls
Il est à ce jour difficile de dire si Eagulls s'avérera entre plus sincère et plus constant que le groupe précité. George Mitchell, son chanteur, confie à qui veut l'entendre son agacement quant aux groupes qui essaient de se coller une image de bad boys sans l'être véritablement. Mais il est vrai qu'entre les costumes d'Halloween du groupe très controversé, une lettre postée sur leur blog qui aura fait jaser (le groupe parlait alors de "beach bands sucking each other's dicks", qui "become known to the music industry heads due to the fact you are girls or have girls in your band", ça se passe de traduction) et leurs textes anti-establishment, Eagulls renvoie tout de même l'image d'un groupe qui travaille son statut. Peu importe tant que la musique est au rendez-vous. Mais ce genre de philosophie conduit parfois/souvent à des deuxièmes ou troisièmes albums trop calculés. Seul le temps nous donnera des éléments de réponse sur le chemin que prendra Eagulls. En attendant, le tout premier opus du groupe, celui aujourd'hui entre nos mains, est une petite merveille à bien des égards, et nous aurions bien tort de nous en priver pour d'obscures raisons. Obscure, cet album l'est, place à la critique track-by-track :
Stephen Colbert David Letterman montre toute la maîtrise du groupe qui, bien que clairement dépassé par l'événement (Bill Murray était présent, il faut dire, et déguisé en Peter Pan), parvient à habiter les lieux avec une rapidité étonnante.
(mp3) Eagulls - Footsteps
(mp3) Eagulls - Amber Veins
Notation : 8,4 / 10 (barème)
Liens afférents :
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Eagulls sera-t-il le meilleur groupe anglais de l'année 2014 ? C'est fort probable. Et autant dire qu'il se battra également pour la place de meilleur groupe européen. Mais qu'importe, l'important réside dans cette information absolument essentielle : le groupe de Leeds vient de faire paraître un premier album sensationnel. Il était déjà l'auteur d'une première cassette en 2010, son premier split avec Mazes et un 7inch en 2011, ainsi qu'un son premier EP, self-titled, en 2012. Mais ce qui se passe avec ce premier opus relève d'une tout autre nature.
Paru le 3 mars dernier sur Partisan Records, cet album est composé de dix morceaux éclatants. À dire vrai, Eagulls est l'auteur d'un Punk Shoegaze qui n'a aucun équivalent. Et il faut dire que la combinaison est peu commune : le shoegaze (les artistes qui regardent leurs chaussures en jouant de longues partitions) semble a priori antinomique du Punk où les accords de guitare se veulent courts et nerveux. Pourtant, Eagulls parvient à lier ces deux styles musicaux pour faire de leur premier album une pièce musicale non seulement super efficace, mais en plus complètement novatrice. J'en profite d'ailleurs pour torde le bras à l'idée que Eagulls produirait en fait du post-punk. Si certains titres s'en rapprochent légèrement, il ne s'est jamais agi dans ce mouvement de pousser de longs riffs interminables, ce que Eagulls fait à merveille. Mais trêve de débats sémantiques.
La musique d'Eagulls est très exigeante, à croire que c'est une constante chez les groupes anglais tant le premier LP de King Krule est éprouvant (génial), et les similarités apparaissent entre Eagulls et Wu Lyf, groupe de Manchester (c'est pas loin) qui avait généré un buzz peu commun au cours de l'année 2011.
En somme, Eagulls est un album super catchy, taillé pour enflammer les clubs undergrounds des capitales mondiales. Eagulls a fait un formidable travail sur la mélodie ce qui fait de son opus un constant-killer. Ce n'était pas gagné d'avance tant les premiers albums tombent souvent dans les extrêmes, et surtout, tant la musique Shoegaze se veut parfois prétentieuse. Ce qui fait qu'Eagulls ne tombe pas dans ces écueils est sa véritable conscience Punk et son souci de s'inscrire dans la continuité de ce mouvement.
Les textes sont aussi noirs et inconditionnels que la musique qu'ils accompagnent. Le groupe n'a pas eu pour souci de donner à sa musique des variations qui ne l'inspirait pas. Peut-être qu'Eagulls aurait gagner, par moment, à donner une place plus importante à la basse de Tom Kelly, pour repartir de plus belle et insuffler un souffle nouveau. Mais c'est finalement l'aspect brut et, en apparence seulement, assez homogènes des créations qui fait de Eagulls un album qui marque d'ores et déjà 2014.
Eagulls façonne un peu plus encore cette année comme étant celle des meilleurs revival nineties depuis bien longtemps. Étonnamment, cet album, outre le fait qu'il mélange shoegaze et punk, mixe également la musique de Sonic Youth avec celle très eighties des Cure ou Replacements. Le résultat est inattendu tout aussi que flamboyant. Cet album croise les genres, les expériences, et les périodes. Trêve d'analyses, place à une nouvelle écoute.