Anachronique : Twink (Psych Pop)

Twink. La légende de la musique psychédélique est composée de beaucoup de groupes anglais et américains. La rivalité entre les deux continents n’a de cesse d’agiter les débats musicaux, certains relèvent 13th Floor tandis que d’autres n’ont de cesse de rappeler l’existence de Syd Barrett. Twink, aka John Charles Edward Alder, était anglais, et force est de constater qu’il a le potentiel de rassembler.
La musique de Twink est de ce que l’on peut décrire comme étant de la pop psychédélique acide. Son premier album, Think Pink, est paru en 1970 via Sire Records. Il intervient quelques mois après que Twink ait quitté son poste de batteur du groupe Pretty Things pour lequel il aura grandement participé à la création de l’album S.F. Sorrow. Pour son album solo, Twink s’est fait aider des musiciens des Deviants (dont Paul Rudolph) (article) et des Pretty Things. Côté production, c’est Mick Farren qui était aux manoeuvres, leader en autre des Deviants, des Pink Fairies, et par ailleurs grand critique musique.
Aucun des titres de cet opus ne ressemble à un autre. On y trouve malgré tout une constante, celle d’un album à la frontière du nouveau et de l’absolu. Il serait bien avisé celui qui trouverait à assimiler cet album d’un autre. Il serait bien malin celui qui reprocherait à Twink de ne pas avoir créé quelque chose de nouveau. Aujourd’hui encore, l’écoute de la musique de John Charles représente un challenge , imaginons ce que la sortie de cet album a dû provoquer en 1970.
Le titre introductif, “The Coming Of The One“, ne nous donne aucune indication sur l’endroit où nous nous trouvons. Une chose est sure, la forêt de la pochette d’album semble déjà bien loin. Peut-être nous sommes tombés dans une trappe. “Ten Thousand Words In A Cardboard Box“, c’est l’histoire d’une guitare et d’une batterie. Les deux se répondent et déstructurent leurs propos. En réalité, le titre participe de nous emmener sur des terrains tous aussi expérimentaux que psychédéliques. L’interlude de “Dawn Of Majic” brouille encore plus les pistes. Ces premiers titres nous laissent dans le flou total.
Fort heureusement, l’introduction de “Tiptoe On The Highest Hill” semble apporter des sonorités plus familières. Le son de la guitare rappelle la douceur de certains accords de Clapton, n’en déplaise à certains. Le titre annonçait déjà une large partie de ce qu’allait être le rock seventies. Les voix de Twink reprennent leur aspect très fantomatique, à la façon Vanilla Fudge. Quant à la lead guitare, elle semble destiner à errer dans un paysage sonore bien fourni et qui conserve pourtant son aridité. Lorsqu’une arrive une autre guitare déchirante à la 3ème minute, on se dit que le monde de Twink regorge de drôles de monstres. L’univers dégagé par le morceau est ténébreux. Ce morceau est un chef d’œuvre de pop psychédélique, si tant est qu’il s’agisse encore de pop. Ces 5 minutes conservent une partie de ce qui a fait le psychédélisme anglais, mais Twink se détache trop de la mélodie pour évoquer les sonorités du continent européen. Sonic Youth en aura tiré de grandes leçons.
L’appellation du titre “Fluid” s’explique dès les premières secondes. Après tout, Twink signifie littéralement “an attractive, boyish-looking, young gay man”. On y trouve l’aspect provocateur du rock’n’roll de l’époque, un temps où les radios libres n’étaient pas si nombreuses. “Fluid” est un morceau qui nous fait l’amour. Quant à “Mexican Grass War“, titre le plus long de l’album, il pourrait bien être également le plus étrange. Ces 5 minutes nous plongent en plein cérémonial d’une tribu africaine, ce à quoi Twink rajoute une batterie très militaire qui n’a de cesse d’imprimer le rythme. Il y a de quoi entrer en transe.
Ne vous attendez pas à du rock’n’roll tout à fait classique avec “Rock And Roll The Joint“. Le morceau reprend la structure de cette musique que l’on connaît si bien. Twink s’approche doucement des roots du blues avec un son wah-wah-ifié. “Suicide“, pour sa part, semble bizarrement être plus jovial que les autres. La voix de John Charles apparaît avec clarté pour la première fois avant que la guitare acoustique ne reprenne de plus belle. La dernière partie du morceau, où deux guitares sèchent se jouant de l’effet stéréo, est un véritable délice. Et puis, on connaissait bien entendu l’histoire des trois petits cochons, mais certainement pas sa version camp hippy. “Three Little Piggies” donne cette impression d’avoir enfin rejoint la forêt que l’album semblait nous promettre. A croire que John Charles aurait trop bu, ce morceau n’a ni queue ni tête. Finalement, “The Sparrow Is A Sign” conclut sur un véritable feu d’artifice qui donne ses dernières lettres de noblesse à un album qui n’en manque pas. Twink y mêle l’aspect brut de la première moitié à la musique plus acoustique et faussement adoucie de la seconde.
Je me garderai bien d’affirmer que tous les titres de cet opus figurent parmi mon Top 20 des titres de musique psychédélique. Seulement, on entend immédiatement que les morceaux de Twink ne sont pas comme les autres. Il ne s’agit pas de l’énième groupe à jouer sur le registre (que j’aime tant, soyons francs) du psychédélisme et du garage. Il ne s’agit pas de l’énième groupe monté pour l’occasion d’une scène qui relevait tous les défis de l’époque. Twink est un groupe dont on se souvient toujours de la première écoute, et voilà pourquoi il est à ce point indispensable.
(mp3) Twink – Suicide (1970)
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