Tall Juan : olden goldies by Juan Ramone

Tall Juan, comme ça, sans communiqués de presse à gogo, vient de faire paraître l’un des meilleurs albums de 2017. Enfilez vos serviettes dans le creux de vos chemises et tenez bien votre couteau dans la main droite, le menu du jour, c’est du “piranha à la Fernet Branca“, et c’est bon !
Paru le 5 mai (hier) via BUFU Records (la maison de Mannequin Pussy, The Lemons et Free Weed, en autre), ce premier LP de Tall Juan se compose de 15 morceaux qui, disons-le franchement, sont au sommet actuel du style “punk acoustique”. Si personne n’arrive à la cheville de Tall Juan, c’est qu’il sait transcender mieux que personne l’esprit Ramones dans un style peu repris car compliqué. L’acoustique et le punk ne riment que trop peu souvent ensemble, et pour cause, il est difficile de transmettre la rage d’un habitant de CBGB sans un son électrique qui caractérise si bien le mouvement par ailleurs. 
Tall Juan, avec ses mélodies impossibles et son phrasé tout droit sorti du Queens a fait sa mue au fil des mois, allant de l’un des artistes les plus prometteurs de la scène à l’un de ceux les plus accomplis. Son premier LP ne fera jamais que confirmant la tendance, Tall Juan a pour lui la folie de Mac DeMarco qu’il sait mettre au service d’un style musique véritablement unique. Il peut donc voir très loin !
Olden Goldies reprend beaucoup des morceaux que nous connaissions déjà. Fort heureusement, ils n’ont rien perdu de leur superbe. Classé 3ème meilleur EP de 2016 (lien), Tall Juan continue de faire forte impression, ce qui fait de cet LP une pièce immanquable de 2017 !
I Don’t Know What To Do” est un titre issu de son excellent Why Not?. Tall Juan met gentiment en route la machine à punk acoustique, soulignant que les Violent Femmes doivent être rappelés comme le meilleur groupe du genre. L’innocence dans la voix de Tall Juan, ce qui rajoute à son côté juvénile-angélique, fait combo ! L’intru’ a un peu évoluée depuis la version de l’EP, elle trouve un peu en grandeur ce qui est tout à fait adapté pour un titre introductif ! Vient ensuite “Baby“, un nouveau morceau plus pop et logiquement moins nerveux. Bien qu’il soit le single de cet album, Tall Juan fait mieux ailleurs ! Disons qu’on l’attend sur un tout autre registre.

I Like To Stay Home” fait partie de ces morceaux que l’on voudrait durer 3 minutes. La musique de Tall Juan est frustrante en ce sens qu’il utilise la même matrice que celle Robert Pollard des Guided by Voices : il ne pousse jamais ses morceaux plus loin que là où il l’estime nécessaire. Les mélodies sont donc très compressées, adieu structure classique couplet-refrain-coupler-refrain, Tall Juan coupe ses morceaux en deux et nous fait regretter que le mode “lecture répétée” n’existe pas sur nos platines vinyles. La même remarque vaut pour “I Wish I Knew“, même s’il est un brin moins rythmé et que l’on résiste plus facilement à sa courte durée.

Getting Cold“, nouvelle pièce de sa discographie, fait du Tall Juan par excellence, preuve que ses codes commencent à rentrer : deux guitares, une voix façon power pop, toujours l’esprit Ramones et des paroles promptes à nous rappeler que l’on n’est jamais aussi bien que dans son petit monde. Tall Juan, une fois encore, est le plus grand de tous les joyeux lurons, chef des batifoleurs, Pape des enjôleurs, je dirai même plus, le lovelace du punk moderne.

Il est fort possible que la dernière fois que j’ai été aussi heureux – du village – à l’écoute d’un album, c’était avec Juan Wauters qui a d’ailleurs participé à la confection de celui-ci. “Falling Down” fait ce que les meilleurs Tall Juan savent faire. Tall Juan utilise toujours autant de doo-wop et voilà bien un nouveau descriptif pour sa musique : du punk-doo-wop. On a l’envie de déménager rapidement en Argentine pour aller danser dans les rues un peu crades de Buenos Aires ! Vient alors “Another Juan“, un titre qui reprend le “Another One” de Mac DeMarco. Et qui retrouve-t-on au piano sur le second cité ? Mac DeMarco himself ! “Parecida A Vos” redonne enfin quelques allures plus Amérique du sud à cet album.

Cuida Coches” introduit la face B de cet album avec ce que serait du Jonathan Richman énervé à force d’avoir écouté les Reatards. “Far Rockaway” perpétue l’énergie inimitable de cet album en y ajoutant un peu plus de oldies, justement. Avec son style à la Tav Falco, Tall Juan semble bien décidé à jouer de la ressemblance avec des élans fifties qu’il assume trop peu.
Kaya” pourrait être un morceau du This Old Dog de Mac DeMarco. Un léger spleen se fait jour et Tall Juan montre alors un visage un peu moins heureux. Mais “It’s True” tue cette tristesse dans l’œuf, rappelant que Tall Juan est bout en train qui saurait donner le sourire à Angela Merkel (encore elle). Tall Juan a-t-il écouté les Aztec Camera ? Tall Juan aime-t-il aller draguer les mineurs de Union Pool (Brooklyn) ? La réponse vient de “Why Not?“. Cet esprit fuck it un peu slacker, disons-le, règne depuis les premières notes de Tall Juan, mieux encore, probablement depuis sa naissance.

Il faut se souvenir que ses premiers mots ont probablement été “why not” (imaginez la scène) et qu’il a depuis conservé cet esprit du punk véritable. Sur scène, Tall Juan aborde un style vestimentaire à la Johnny Thunders, époque New York Dolls. Il a du rouge à lèvres, un foulard un peu chicos et des t-shirts en maille, comme pour mieux montrer ses seins. Androgyne qu’il est, Tall Juan casse le code du punk 2010′ qui n’en finit jamais d’affirmer sa virilité avec des morceaux qui parlent de bières. 
Time Bomb“, c’est une reprise de l’album Subterranean Jungle des Ramones. Quelque chose me dit que l’on reparlera TRÈS VITE. “Take Your Time” vient finalement conclure le tout sur quelques accords pleins d’amour… lorsque je vous disais que le twee est à la mode !

Tall Juan fait tout ce que les grands savent faire : délivrer des hits pour les années à venir avec ce petit air nonchalant, comme si tout cela était finalement normal et facile. Sur scène, Tall Juan applique chacun des conseils données par Ian Svenonius dans son Supernatural Strategies for Making a Rock ‘n’ Roll Group, un chef d’oeuvre ! Tall Juan saura appréciera le compliment. Finalement, un peu comme Chain & the Gang, Tall Juan joue avec tous les codes de la scène et c’est comme ça qu’il les casse le mieux. Ce Olden Goldies est une masterpiece et l’on a l’impression d’assister à la première brique véritable d’une discographie d’exception. J’en reparlerai en 2020. Avec Olden Goldies, Tall Juan gagne finalement le dernier galon qui consacre enfin sa nouvelle appellation : Juan Ramone. 
Tracklist:
1. I Don’t Know What To Do
2. Baby
3. I Like To Stay Home
4. I Wish I Knew
5. Getting Cold
6. Falling Down
7. Another Juan
8. Parecida A Vos

9. Cuida Coches
10. Far Rockaway
11. Kaya
12. It’s True
13. Why Not?
14. Time Bomb
15. Take Your Time

Liens :
Article sur son EP Taller Than Ever
Article de présentation de Tall Juan

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