TH Da Freak, c’est la nouvelle mascotte de Howlin Banana Records. Je m’arrête là ? C’est tentant, et ce serait probablement suffisant, mais il y a trop à dire pour que je résiste à m’en priver. Ce groupe originaire de Bordeaux a débarqué il y peu à la Mécanique Ondulatoire pour une soirée du label qui avait envoyé une belle claque à tous ceux qui été présents ce jour-là. Je m’étais depuis promis de lui consacrer quelques déclarations d’amour, mais encore fallait-il que je retrouve mon stabilo pour griffonner quelque chose sur un bout de papier que je ferai passer au groupe en plein milieu du cours de mathématiques.
TH Da Freak est donc un trio qui fait dans le genre indie inspiré des années ’90, et donc, de Pavement. Dans la mesure où chaque groupe qui cite Pavement comme référence bénéficie, de fait, de ma plus grande sympathie, je ne pouvais qu’opérer une lecture biaisée de son LP, The Freak, parue il y a un mois environ et qui oscille entre composition Beck-ienne (période early 90′) et freak-attitude.

L’album est introduit sur “Aristocrat“, un titre très The Mollusk. “Slugs“, le petit second, est déjà un indice de la volonté anti-mainstream de TH Da Freak . On la retrouvera – en fin d’article – dans ses créations punk qui, par nature, sont toujours en opposition à quelque chose d’existant.

Je parlais de Beck en introduction de cet article et je crois que “Morphing” ne pourrait mieux informé l’auditeur sur l’amour que semble porter TH Da Freak à cet artiste. Beaucoup se libelent “weird pop”, mais je crois que la palme de l’année 2017 revient pour l’heure à cette formation qui, avec le son crunchy de Further et les variations de Archers Of Loaf, vient de prouver à son petit monde qu’il faudra compter sur lui dans les années à venir. La deuxième moitié de ce morceau est Grande.

Edgythings” reprend le chemin de l’acoustique à la Calvin Johnson. Th Da Freak s’impose ici comme l’un des rois contemporains de la musique post-nineties. La prod’ est irréprochable, on croirait assister à l’enterrement de Mercury Rev. “No Body Keen” va plus loin encore, faisant croire à du Alexander “Skip” Spence en 1993. L’utilisation de ce morceau dans le sequel de Beetlejuice serait une excellente idée. “Electrocution” vient clore la première face de l’EP sur du Dinosaur Jr. en puissance.

The Coppery Light” tire sur du noisy comme beaucoup de groupes de la scène nineties qui avaient en commun un son grungy coupé au couteau. TH Da Freak sait décidément comment exploiter chacun des recoins de cette immense décennie, c’est la grande force de son LP. “Juggling The Pot” – Royal Trux ? – fait état d’une autre facette de la décennie de Superchunk, mais TH Da Freak s’y perd un peu, je ne crois pas que l’on gagne en cohérence et l’élan créé par les morceaux précédents est un peu freiné. Ween et Holy Sons savaient y faire dans le genre weirdo déstructuré, mais reproduire ce même effet est sacrément difficile. Quant à “Imogen Poots“, il semble tout droit sorti d’un court métrage de Jarmusch et on file ainsi vers “Trick Machine“. Comme pour plusieurs des titres de cet LP, on se dit que le “Hate Paste” de Archers Of Loaf a fait de beaux enfants. “Tell Your Secrets To The Strangers” clot cet LP à tendance expérimentale sur quelques boucles plus mélodieuses, façon Lotion.
Mais ce n’est pas tout. TH Da Freak a eu l’excellente idée de faire paraître un nouvel EP il y a quelques jours à peine. Ceux qui l’ont vu évolué sur scène savent qu’il est plus énervé qu’il n’y parait. TH Da Freak a semble-t-il décidé de rendre hommage à ses performances lives dans un nouvel EP qui est beaucoup plus garage-punk-psych-stoner, moins 1990, plus 2010. Le tout est à mon sens plus consistant que son LP. 
Hot Dog“, le premier morceau, ne lésine pas sur les réverb’ en tout genre. Sans mimer les Oh Sees, TH Da Freak se rapproche du son de la scène actuelle à grand pas. “Looking For The Doggo” est plus saccadé, ce qui a le mérite de lui donner un aspect punk-pas-à-chien qui contraste avec la prod’ mid-fi. Et “Doge” de reprendre la même formule ! Th Da Freak construit son morceau sur la base d’une structure proto-punk à laquelle il ajoute un maximum d’effets. C’est une idée peu exploitée et au demeurant tout à fait brillante. “Bitten By A Dawg“, le dernier titre de cet article, est à mon sens le meilleur de tous, parce qu’il encapsule tout ce qui fait de Th Da Freak une formation véritablement unique : une exécution irréprochable, des mélodies fouillées sur la base de structures punk, un penchant nineties et le fourmillement de dizaines de sonorités.
Il semblerait donc qu’il faille que l’on s’habitue à ne pas savoir prononcer le nom de ce groupe. Une chose est sure, ces mecs-là semblent ne pas être à court d’idée. Peut-être que la suite du TH Da Freak se trouve à mi-chemin entre son LP et le récent EP : dans un nineties plus fourni et plus rentre-dedans, car si l’EP est plus abouti, les moments de haute voltige de son LP n’ont aucun équivalent sur la scène . Trop peu de groupes savent tirer parti du meilleur des années ’90s dans une époque où le shoegaze est sur-représenté. TH Da Freak a ce pouvoir magique de remettre Winona Ryder au coeur de nos rêves les plus érotiques. Je prends le pari qu’un LP qui soit à la fois garage et indie rock pourra séduire les “groupies mal dégrossies” de Slint et autre Weezer.

(mp3) TH Da Freak – Looking For The Doggo
(mp3) TH Da Freak – Bitten By A Dawg

Tracklist :
The Freak (LP, 2017)
1. Aristocrat
2. Slugs
3. Morphing
4. Edgythings
5. No Body Keen
6. Electrocution
7. The Coppery Light
8. Juggling The Pot
9. Imogen Poots
10. Trick Machine
11. Tell Your Secrets To The Strangers

Garage Punk Songs For Doggos (EP, 2017)
1. Hot Dog
2. Looking For The Doggo
3. Doge
4. Bitten By A Dawg

Liens :
Article sur Ween
Article sur tous les groupes Howlin Banana Records

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