LP Review : Tim Presley – The WiNK (Experimental Pop)

Tim Presley. Je ne crois pas qu’il soit encore possible d’ignorer qui est Tim Presley, mais obligeons nous malgré tout à une rapide biographie. Tim Presley est un multi-instrumentaliste qui s’est fait connaître à travers le groupe White Fence (7 albums studio) qu’il continue de mener d’une main de fer. Il s’était également fait remarqué à l’occasion d’un album avec Ty Segall, le dénommé Hair (article) et il nous avait éblouï avec DRINKS (article), son projet commun avec Cate Le Bon (article). Nous en étions resté là. 
Une des bonnes nouvelles de 2016 est donc que Tim Presley se soit enfin décidé à faire paraître un album sous son propre nom. Le démarche n’est pas bien différente de ce qu’il fait avec White Fence, mais il profite de l’occasion pour nous proposer des sonorités nouvelles. Maître en matière de musique psychée et expérimentale, il saisit l’occasion de The WiNK pour reprendre l’univers de DRINKS et pour l’agrémenter d’une volonté encore plus disruptive. Ça passe, ou ça casse.
Mais avant toute chose, soulignons pour notre plaisir
personnel à quel point la pochette de cet album est réussie. A quand
une exposition des peintures de Tim Presley ? Je lance l’idée, un concert de Presley entouré de ses peintures serait sacrément bien. Maintenant, que nous réserve The WiNK ? “O’Guardian A” est une introduction ambiance musique électronique berlinoise des années ’90. On passe. “The Wink” enchaine, et cette fois-ci, on retrouve la musique psychée tout en contrôle de Presley. Le côté proto-pop de DRINKS ressort immédiatement, mettant sa voix au service d’une musique cathartique qui évolue par à-coups.
Can You Blame” se différencie immédiatement du précédent avec une production beaucoup plus brute. C’est l’une des marques de fabrique de Tim Presley – et de cet album -, sa volonté de surprendre plus que de créer des mélodies immédiatement compréhensibles. Il y a en cela une antinomie avec la volonté d’un artiste pop qui doit (peut ?) vouloir s’adresser au plus grand nombre. “Solitude Cola” perpétue le mouvement. Ces premiers titres introductifs sont de qualité.
Ce sont des morceaux comme “Goldfish Wheelchair” qui font de The WiNK un album en plein dans la continuité des Velvet. Presley et Cate Le Bon sont probablement les deux plus grands fils (fille) spirituels de la bande de Lou Reed. “Goldfish Wheelchair” est délicat, la voix de Tim Presley sur deux pistes est tout aussi poétique qu’une piqure dans le bras d’Allen Ginsburg. Et puis, “Long Bow” vient clore la première Face de l’album. Ce titre, qui fera incontestablement partie de ceux qui resteront à la toute fin de l’histoire, est une charge parfaitement distillée, et un peu de colère, ça fait du bien. La guitare de Presley prend enfin son envol, il aura fallu attendre longtemps pour qu’il exploite enfin quelques-uns de ses skills les mieux connues.
Morris” est la seule balade de cet album. Presley joue le rôle du crooner un peu désabusé par une vie passée dans les bars. Une instru’ électronique vient compléter le tableau, c’est déroutant et bienvenu. “ER” reprend le train vers plus d’expérimentalisme. C’est exactement ce qui manque à la scène indépendante de 2016, mais une mélodie, c’est bien aussi.
Underwater Rain” enchaine avec un univers brumeux qui répond à nos attentes. Ce morceau, une sorte de Raymond Scott qui rencontre un geek kautrock, a pour lui une instru’ fournie qui nécessite un effort rapidement récompensé.
Je passerai alors rapidement sur “Kerouac” dans la mesure où il m’est impossible de critiquer un titre qui porte ce nom. “Ma garce de vie s’est mise à danser devant mes yeux, et j’ai compris que quoiqu’on fasse, au fond, on perd son temps, alors autant choisir la folie“, disait-il, et c’est assurément ce que Tim Presley s’applique. “Clue” reprend la proto-pop des premiers titres que Presley agrémente d’une instru’ variée. “Aura Aura” clos la marche et voilà qu’il laisse toute sa place au spleen qui hante chaque seconde de The WiNK.
Au final, The WiNK est un album difficile à appréhender parce qu’il cherche à brusquer son auditeur, – ce que l’on ne peut féliciter – et parce qu’il est très inégal. Force est de constater que l’album rate sa cible à plusieurs reprises. L’aspect pop de musée persiste malgré les écoutes et une bonne poignée des morceaux de cet album sont inappropriables. Peut-être The WiNK est-il trop ambitieux, toujours est-il que Presley nous a habitués à des albums plus complets. The WiNK ne nous emporte véritablement jamais, et au final, on en veut plus.
À ce stade, j’ai certes conscience de l’aspect contre-productif d’écrire un article pour demander que les artistes expérimentent plus (lien) et de critiquer ensuite ceux qui le font. Seulement, il serait trop facile de s’extasier devant chaque LP qui ose ne pas suivre les clous que la scène martèle sans cesse.

Notons dans le même temps que certains de ces morceaux sont de magnifiques témoignages de ce qu’était la scène 2016 qui essayait. “Long Bow“, pour ne citer que lui, vise en plein dans le mille en nous faisant danser sur des harmonies que nous n’imaginions pas être possible. Un constat s’impose rapidement : on se souviendra de l’écoute de The WiNK bien plus longtemps que de celle de la très grande majorité des LPs parus en 2016. Seulement, Tim Presley ne semble pas atteindre les sommets pop qu’il avait côtoyés sur Family Perfume et For The Recently Found Innocent.
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