LP Review : GØGGS – GØGGS (Garage Stoner)

GØGGS, c’est le nouveau projet de Ty Segall, Chris Shaw (Ex-Cult) et Charles Moothart (CFM / Fuzz). Ça sonne bien. Le 1er juillet, il fera paraître son premier album via In The Red Recordings, la maison de beaucoup de groupes de stoner / punk de la scène.
Cela fait un moment déjà que l’on est informé de l’existence de GØGGS. Ainsi en parlait-on en juillet 2015 (lien) et, plus récemment, avec Larry Hardy (le boss de In The Red) qui ne manquait pas de signaler la sortie de cet LP (lien). On sait également que Ty Segall et Charles Moohart viennent tout deux de sortir un excellent album, respectivement Emotional Mugger et Still Life of Citrus and Slime. GØGGS est ainsi l’une des sorties les plus attendues de l’année. A juste titre ?
L’album est introduit sur “Falling In” et l’on comprend d’entrée que GØGGS sera d’une violence inouïe. Un peu de stoner dans ses céréales, c’est brutal, mais ça peut le faire. Chris Shaw s’en donne à coeur joie, on bloque déjà avec la voix, mais il faut aller plus loin pour voir ce que GØGGS a dans le ventre. “Shotgun Shooter
She Got Harder
” ne fait pas vraiment mieux. Le titre veut trop en faire, aller trop vite, être trop morbide, trop trop trop. Autant Fuzz avait su exploser les compteurs en dévoilant un album sans une once de pop, autant on voudrait déjà que GØGGS mette de l’huile d’olive dans sa soupe (ça adoucit). “She Got Harder” vient compléter le trio introductif. Il est un brin plus varié, on reconnaît le style de CFM en fond sonore. Ce single ne mérite pourtant pas ce statut, cet album détient quelques titres plus intéressants.
Smoke The Würm” est mieux produit que les trois premiers. GØGGS souffle fort, mais la voix est moins agressive de sorte que l’on jubile lorsque l’instru’ emprunte au punk sur les premières variations. C’est avec “Gøggs” qu’arrive finalement le premier titre qui pourra marquer l’année. Sa structure est d’une simplicité déconcertante ce qui le rend immédiatement très attachant. On reconnaît bien la touche Ty Segall, version Twins. “Assassinate The Doctor” est encore meilleur. GØGGS semble enfin s’intéresser à la structure de ses morceaux. Il suffit de peu pour qu’il passe d’un morceau indifférent à quelque chose de génial, surement les 20 secondes nécessaires à Ty Segall avant d’entrée en studio pendant lesquels il propose une idée, plutôt que de jouer le plus fort possible. On en revient à ce que dénonce Ian Svenonius dans son documentaire (lien) : tout est histoire de puissance sonore dorénavant. Il le déplore, et venant de l’ancien leader de Nation of Ulysses…

On continue alors avec “Needle Trade Off“. La voix de Ty Segall apparaît en fond, GØGGS semble définitivement s’éloigner du stoner introductif pour plus de punk. Il faut suivre, mais GØGGS est suffisamment bien produit pour que l’expérience soit réussie. Vient ensuite “Future Nothing“, musique pour punk à chien (et à crêtes). Cette fois-ci, on ne s’en voudra pas de décrocher. 
Final Notice” est l’avant-dernier morceau de cet album. La différence avec les autres titres de cet LP est marquée d’entrée de jeu. Sorte de thriller analogique pour âmes malades, il a l’avantage d’essayer un style musical encore inconnu, ce que l’on ne peut qu’encourager. Tout ça finit sur les chapeaux de roue. C’est Damaged Bugs qui va aimer. GØGGS clos la marche sur “Glendale Junkyard“. A ce stade, le reste de l’album nous a déjà démembré, alors on se jette dans la fausse avec le sourire. 

GØGGS manque une certaine balance, soit dans l’instru’, soit dans la voix, soit dans le rythme, soit dans la production. Les albums concepts sont une excellente idée, oh combien excellente, mais il s’agit toutefois de ne pas créer une seule et unique sensation. C’est pourtant ce que ce premier LP de GØGGS se contentent de faire. On est horrifié tout au long de son écoute – et c’est le but recherché – mais on ne sort jamais de cette torpeur pour y ressauter à pieds joints. 


En fait, GØGGS n’est jamais aussi bon que lorsqu’il ajoute un peu de punk à l’équation. On y ressent une énergie plus brute et plus humaine qui tend à apporter un peu de chaleur à cet album qui en manque. Il le fait un peu sur la deuxième moitié de l’album, mais c’est encore insuffisant. Alors, disons le clairement, GØGGS pour l’heure en est deçà des autres projets de Ty Segall. On soupçonne qu’il n’est pas eu la main mise sur tout le projet, dévoilé un album à ce point uniforme lui ressemble finalement assez peu. GØGGS est d’une noirceur absolue, ne laissant passer aucune lueur d’espoir dans un univers défriché par cette instru’ stoner qui nous tire constamment vers le bas. 

Ty Segall est connu pour laisser toute la place à ses collaborateurs, alors, peut-être que GØGGS ne doit pas être pris comme l’un de ses albums, mais seulement un album auquel il participe. Pour une note finale qui soit plus positive, notons que l’on se souviendra peut-être aussi de Ty Segall comme étant l’artiste qui aura amené toute une génération vers un rock’n’roll noir et torturé. Quoi qu’il en soit, on continuera de surveiller GØGGS, parce qu’après tout, on aime bien les édentés nous aussi.

Liens afférents :
Article sur l’album de CFM
Article sur Emotional Mugger de Ty Segall

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