Album Review : Jack White – Blunderbuss (Indie Rock)


Album Review : Jack White

Blunderbuss

” Le plus grand musicien du 21ème siècle so far



Jack White. Depuis l’un des premiers articles de Still in Rock jusqu’aujourd’hui, Jack White n’en aura pas fini de créer l’actualité. Collaborations en tout genre – avec Beck, Danger Mouse, Tom Jones et j’en passe énormement -, production – Seasick Steve, Karen Elson, Alabama Shakes, Jeff The Brotherhood, The Black Belles et bien d’autres encore -, développement de son label Third Man Record, il est partout et toujours là où on ne l’attend pas. Cet album, Blunderbuss est son premier album solo. Loin d’être du White Stripes remanié comme on le lira sûrement, il est celui d’un Jack White libre de choisir sa ligne artiste, celui d’un Jack White au sommet, comme à son habitude.


À cent lieues des sentiers battus et de ce que 2012 à a nous offrir, le rock de Jack White est plus marqué que les autres, on y retrouve indubitablement la touche des très grands. Ses compositions ne sont pas hasardeuses, un véritable leitmotiv habite Jack White, celui de créer un album à l’univers complexe et déterminé, un opus qui marque les esprits et en inspire beaucoup. Sa volonté de faire un album qui ne ressemble pas au Kinks ne peut être mieux menée à terme. Nous dirons dans 20 ans que certains artistes font du Jack White.

Plus Jack continue à s’essayer à différents styles et plus nous sommes impatients du temps qui passe : vite, que les albums défilent et qu’une fois pour toutes l’histoire musicale du 20ème siècle ait sa discographie référence. Vous trouvez trop cher le prix du billet pour vous rendre dans l’Ouest Américain ? Il ne vous coutera qu’un vinyle de Blunderbuss pour un voyage plus beau encore. Plus de 40 minutes durant, Jack White nous emmène avec lui à la recherche d’un son d’excellence, une recherche qui vite trouve plus étonnant encore que ce à quoi on pouvait s’attendre.

Le piano n’a jamais été aussi présent dans aucun des albums de Jack White, et n’y voyez pas le signe du hasard : s’il est de loin le meilleur guitariste actuel, capable de transcender un instrument qui depuis des dizaines d’années fait l’objet de toutes les attentions, il est aussi le meilleur songwritter de sa génération et le piano laisse différemment place à des paroles plénières et authentiques. Notons que deux groupes accompagneront Jack sur scène, l’un entièrement composé de femmes, l’autre entièrement composé d’hommes. Pour créer cet album, Jack confie avoir travaillé un jour avec l’un pour, le lendemain, revisiter le tout avec l’autre, d’où l’extrême richesse de ces compositions. Et puis, comme il le dit, travailler avec des femmes change “the entire mood“. Mais je crois qu’il est à présent temps de laisser place à la critique détaillée :


  • Missing Pieces : Un titre très introductif qui plante le décor : Jack White 2.0 est parmi nous. Les crissements de guitare annoncent la couleur, ce Blunderbuss en a beaucoup sous le pied, préparons-nous au meilleur.
  • Sixteen Saltines : Titre dévoilé avant la sortie de l’album, “Sixteen Saltines” est doté d’une incroyable énergie dont le final n’est que le paroxysme. La voix sur double piste est un pur bonheur à la hauteur de ce final pharaonique.
  • Freedom at 21 : Ce titre est exceptionnel, le plus nerveux de l’album, sans conteste. Parmi les meilleurs jamais composés par Jack White, seule une écoute stéréo vous permettra d’accéder au Saint Graal, car c’est bien de ça qu’il s’agit.
  • Love Interruption : Ce titre, le premier divulgué, fait à présent partie de nos meubles. “Love Interruption” est de ces classiques qui forgent l’extraordinaire carrière de Jack White. Il y est dans son élément, et nous aussi. Detroit n’a jamais semblé si proche, America, here we come.
  • Blunderbuss : Jack White renoue avec ces premièrs amours : un piano acoustique, quelques interludes et d’énormes slides de bottleneck. Musicalement très riche, Jack varie les instruments comme jamais. Titre éponyme, c’est après quelques écoutes que l’on comprend la cohérence de ces quelques minutes. Si “Doing What People Need Is Never on The Menu“, voilà en tout cas bien ce que nous voulions. Déjà l’un de mes titres préférés.
  • Hypocritical Kiss : Des paroles très directes signe d’un Jack White inspiré un piano pour accompagnement et toujours le même soin apporté au final. Ce titre, avec “Blunderbuss“, semble revisiter le terroir américain avec gaité. Le final nous transporte au pays de l’oncle Sam.
  • Weep Themselves to Sleep : Autre titre très coloré, façon The Raconteurs, Jack White y renoue avec la fougue de Consolers Of The Lonely. La présence continue du piano, cette fois-ci pièce maitresse, vient très agréablement ponctuer quelques riffs acidulés. Avez-vous seulement déjà entendu une guitare crisser de la sorte ? Les deux dernières minutes viennent rappeler qui est le boss du rock mondial.
  • I’m Shakin’ : L’indie Rock-Gospel, vous connaissiez ? Abandonnez boisson énergétique et autres excitants, “I’m Shakin” se suffit à lui même. Le groove de ce titre est absolument implacable. C’est dès l’introduction que l’on comprend à quel titre nous avons à faire, décollage imminent.
  • Trash Tongue Talker : On reconnaît la façon de jouer du piano de Jack dès les premières secondes, puis viennent sa fougue, son audace, cette folie qui fait de lui à un artiste au dessus du lot.
  • Hip (Eponymous) Poor Boy : Entendre Jack White avec un banjo, ce n’était pas joué d’avance. On s’y balade dans sa ferme, à la recherche d’une paille à se mettre sous la dent. Poor boy.
  • I Guess I Should Go to Sleep : Contrebasse et insouciance, nonchalance et autodérision, voilà bien un artiste qui sait se jouer des codes.
  • On and On and On : Poussiereux, “On and On and On” aborde d’un air de far-ouest qui ne donne qu’une envie : enfourcher son cheval et partir explorer les canyons. La guitare qui surgit à la 3ème minute ne pourra que nous aider dans cette quête de l’impossible rêve américain.
  • Take Me with You When You Go : Ce titre est le plus parfait résumé de ce nouveau Jack White : d’abord dans l’Ouest américain, on y retrouve des riffs acérés au service de vos tympans les plus solides. Lorsque Jack lâche les tigres, c’est un des meilleurs moments de l’opus qui s’offre à vous, pour un final de toute beauté.
This record was always there“. L’intégralité des titres de cet opus devient, après quelques écoutes seulement, un véritable classique. Indémodable, cet opus marque le début d’une carrière solo dont nos arrières petits enfants parleront. Dès à présent, vous pouvez dire que vous y étiez, là, attentif à la sortie du premier opus solo du plus grand musicien du 21ème siècle so far

Si Blunderbuss parait non pas sur le label de Jack White, Third Man Record, mais sur Columbia, Jack s’en explique très librement. Meilleur label pour les artistes solo, c’est aussi historiquement le premier de tous et celui qui dispose de la plus grande distribution, nulle volonté de créer de l’indie. Et puis, comme il le dit si bien, tous ses artistes préférés étaient sur des labels majors, les Sex Pistols, les Ramones, Robert Johnson … Il est par ailleurs intéressant de noter que la maquette de l’album a été particulièrement soignée, quel titre pour introduire la face A, la conclure, idem pour la face B. Aussi, si Jack confie ne jamais savoir lequel va susciter le plus d’engouement façon “Seven Nation Army“, il serait périlleux de s’y essayer.

L’écoute de cet album pourrait bien changer notre perception de la matière indie. Il serait fou de ne pas y voir un incroyable tour de force, le témoignage du plus grand des génies, virtuose d’une génération passé maître absolu dans l’air de créer une matière qui échappe à la substance musique pour plus encore s’enchâsser en nous. On le dit trop peu, mais la voix de Jack White est l’une des plus belles signatures vocales qu’il nous soit donné d’entendre. Que d’appréhension, des années d’attente, Jack White et un album solo, j’en rêvais, il l’aura fait. Blunderbuss, parce Jacques le vaut bien.

Notation : 9,4 / 10 (barème)

Premier article écrit sur Blunderbuss

3 Comments

  • LaTouf

    Là, je me retiens. J'ai précommandé le vinyle. Je ne l'écouterai pas avant !

  • souris modest'

    wow je suis vraiment pas déçue, l'album est extra! il n'a pas fini de tourner en boucle sur ma platine le casque audio vissé sur les oreilles!!

  • LaTouf

    C'est un très très bon album. Assez triste également, les paroles sont très désenchantées : Sur hip (eponymous) poor boy, comment ne pas voir sa déception par rapport aux white stripes disparu(e)s? Et sur Freedom at 21, c'est évidemment le rif de 7 nation army qui est repris quasiment accord pour accord, avec une ambiance bien différente ! Regret? En tout cas un album à la fois profond, plein de sens, magnifiquement composé. Une merveille.

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