“Lust for Life” Est Notre Réponse au 13 Novembre 2015


FRENCH version
(english below)

Je ne voulais pas m’exprimer trop en avant sur les événements du vendredi 13 novembre 2015. Les mots doivent être prudemment choisis. Et puis, Still in Rock n’a pas vocation à chroniquer les faits de société. Encore moins à chroniquer les abominations de notre monde. Seulement, cette fois-ci, les fondements de notre culture commune sont directement visés. Cette fois-ci, le rock’n’roll a fait l’objet d’une attaque et ma relation charnelle avec cette musique/mode de vie m’impose de m’exprimer.

Avant tout, comme je l’ai déjà dit, je transmets mes profondes et sincères condoléances à l’ensemble des personnes touchées par ce massacre. C’est la main tremblante que j’écris cet article. Des amis, des connaissances sont tombés. Puissent les lignes qui suivent arriver aux oreilles des inhumains, j’en serais comblé.



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À vous,

Lester Bangs disait que le rock’n’roll n’est jamais qu’un reflet de la société, qu’il traduit les mouvements sociaux, sans jamais les créer, sans jamais lui donner cette responsabilité. Pourtant, ce vendredi 13 novembre 2015, l’histoire lui a donné tort. Peut-être pour la première fois, le rock’n’roll a fait l’objet d’une lourde attaque meurtrière. Le rock’n’roll a été visé pour ce qu’il est : une forme d’art brute, vivante, subversive, toujours dans la luxure. Vous, les barbares, avez dénoncé une “fête de la perversité“. Peut-être avez-vous raison : j’aime la perversité.

J’aime mes “Jam Kids“, mes “Summer Babe“, mes “Fucked Up Motherfucker“, mes “40oz. On Repeat“, mes weekend sous forme de “Gonerfest“, j’aime regarder la “Nurse” qui viendra me soigner de votre bétise pendant que j’écouterai Perfect Pussy, j’aime lorsque Slutever me susurre des mots doux à l’oreille, ma sympathie et ma romance avec le diable, j’aime le “Fire of Love“, le “Sex, Dope & Violence“, j’aime lorsque je suis “Too Drunk To Fuck“, j’aime to “Fuck Me“, j’aime to “Fuck“. Ouais (vidéo). Moi aussi, tu vois, je suis born to be wild. Et si pour l’heure “I Can’t Erase this Feeling“, n’oublies jamais que tu ne pourras pas “Fucked Up My Dreams“.

Cette luxure, luxure sexuelle, luxure musicale et artistique, luxure comme mode de vie, luxure comme système de pensée, elle se construit de façon “désordonnée ou incontrôlée“. C’est sa définition. Alors, lorsque tu veux lui imposer un ordre, lorsque tu veux l’empêcher, elle trouve une nouvelle raison d’être. Avec ces attaques, vous, les brutes, avaient touché une des caisses de résonnance du rock’n’roll. Vous avez d’autant plus justifié son existence, la prouvant plus belle qu’aucune des pensées que vous n’avez jamais pu formuler. La communauté du rock, notre communauté, s’est immédiatement mobilisée. Les artistes du monde entier se sont soutenus, emportant avec eux les labels, les tourneurs, les journalistes, tout ce beau monde que j’aime tant !

A l’image de la “The Fish Slapping Dance” des Monty Python, je voudrais vous dire, à vous les sauvages, que vous aurez beau perpétuer vos frappes, nous continuerons à nous rendre (vous rendre ?!) à tous les concerts de nos groupes préférés, nous continuerons à vanter les mérites d’une vie de luxure, nous continuerons à organiser de grands festivals, nous continuerons à arborer un splendide sign of the horns. C’est une partie de notre réponse. Quelle aurait été celle de la génération CBGB ? Ils vous auraient donné le middle fingers, eux. S’il faut demain intellectualiser notre mouvement, je vais en réalité me contenter de faire de même dès aujourd’hui. Vivement mon prochain concert que je vous envoie mon selfie mode européenne. Notre génération, amoureux post-2000 du rock’n’roll, n’oublierons pas l’esprit de rebellion.  

Je voudrais, également, revenir un instant sur la nécessité du rire. “Tu apprendras encore à rire comme les immortels“, disait le grand Hermann Hesse. Ce rire, ce pouvoir des immortels, doit être perpétué. Là se trouve l’essence du rock’n’roll, The Most Super Invincible Joke in History. Les barbares n’aiment pas le rire ? Je l’aimerai d’autant plus. Les barbares n’aiment pas la fête ? Je l’aimerai d’autant plus. Je vous regarde et continue d’apprendre tout ce qu’il faut que je sois : l’inverse de ce que vous êtes. J’irai vous rire au nez, un burger à la main, un t-shirt de Wayne’s World sur le dos (parce que mon monde à moi, c’est celui-ci) et mon iPod à fond la caisse grâce auquel j’écouterai en boucle mon “Thank God For Sinners” (merci pour les pécheurs) de Ty Segall. Je prierai, oui, mais je prierai Elvis Presley et Joey Ramones pour que les fûts de bière coulent plus vite (m’y voilà), pour que l’amour coule plus vite encore, pour que l’on rit.

Vous avez directement visé la jeunesse française. Well, si tu voulais nous priver de nos modes de vie, good fucking luck comme l’a si bien dit John Oliver. La Révolution coule dans nos veines endurcis au son de l’indie rock, à la sueur de nos concerts de garage, aux fluides que nous partagons à l’écoute de rock psychédélique. A l’image de ce que disait Leonard Bernstein, “This will be our reply to violence: to make music more intensely, more beautifully, more devotedly than ever before.”, comme l’a si bien signalé un lecteur Still in Rock.

Vous savez, le rock’n’roll m’a beaucoup appris. Pavement m’a appris jusqu’où l’ironie pouvait aller. Les Ramones m’ont appris à quel point la bêtise pouvait être belle. Les Velvet Underground m’ont appris à la libération sexuelle et l’extase d’une œuvre d’art. Et Dieu que je vis d’extases depuis ! Le rock expérimental m’a appris que l’ordre n’était pas la plus belle des choses. Le rock psychédélique m’a appris que je pouvais m’évader de ce monde, non pour aller côtoyer un esprit supérieur, mais pour aller jouer dans chacun des recoins de mon âme. Les punk m’ont appris à ne pas obéir, à ne croire qu’à la moiteur d’une salle plongée dans le noir, de celles que vous avez attaquées.

George Carlin, que vous détestez tant pour ses positions athéistes, était lui aussi un amoureux du rock’n’roll, pour toutes ces raisons que nous partageons. Je vous prie de croire que vos âmes seront à jamais accompagnées de ses seven dirty words : shit, piss, fuck, cunt, cocksucker, motherfucker, and tits. Je vous le redis, pour le plaisir et en français : merde, pisser, baiser, connard, suceur, baiseur, téton. Je me les répète en boucle, en écoutant le “Sex & Drugs & Rock & Roll” de Ian Dury.

En s’attaquant au rock’n’roll, en s’attaquant à mes amis qui étaient au Bataclan, en s’attaquant à tout ce à quoi je crois, vous vous êtes exposés à notre réponse. Dans son Paris est une Fête, Ernest Hemingway a écrit “Si tu as eu la chance d’avoir vécu jeune homme à Paris, où que tu ailles pour le reste de ta vie, ça te reste, car Paris est une fête.” La fête continuera toujours. Vous nous avez attaqués un vendredi 13, nous serons désormais vôtre épouvantail, notre joie sera vôtre Jason Voorhees qui renaîtra de plus belle à chacun des concerts auxquels nous irons. Et je vous promets de boire une pinte en plus à chacun d’entre eux. A la vôtre. Ni Dieu Ni Maitre, si ce n’est le rock’n’roll. 


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ENGLISH version
(french above)

I didn’t want to express myself too early on what happened on Friday, 13 November 2015. The words must be carefully chosen. Plus, Still in Rock’s purpose isn’t to review what is happening in the world, and even less to review all abominations. But this time, the foundations of our common culture have been directly targeted. This time, rock’n’roll has been subject of a massive attack. My physical relationship with this music/lifestyle required me to express myself.

Above all and once again, I extend my deep and sincere condolences to all of those affected by the massacre. I am writing this article with a shaking hand. Friends and acquaintances have fallen. May the inhumans read the following lines.



To you,

Lester Bangs said that rock’n’roll is a simple reflection of society, an art form which does not ever create any social movement. Yet, this Friday, on November 13, 2015, history has proved him wrong. Perhaps for the first time in history, rock’n’roll has been the subject of a heavy murderous attack. Rock’n’roll has been targeted for what it is: a raw art form, alive, subversive, always in lust. You, the barbarians, have denounced a “feast of perversity“. Maybe you’re right: I like perversity.

I love my “Jam Kids“, my “Summer Babe“, my “Fucked Up Motherfucker“, my “40oz. On Repeat“, my “Gonerfest” weekends, I like to watch the “Nurse” who will cure me of your stupidity while listening to Perfect Pussy, I love when Slutever whispers dirty words in my ear, I love my sympathy and romance with the devil, I like the “Fire of Love“, the “Sex, Dope & Violence“, I like to be “Too Drunk To Fuck“, I like to Fuck Me“, I like to “Fuck“. Yeah (video). Me too, you see, I’m born to be wild. And if “I Can not Erase this Feeling” for now, do not forget that you will never be able to “Fucked Up My Dreams“.

This lust, sexual lust, musical and artistic lust, lust as a lifestyle, lust as a system of thoughts, is built with “disorder“. It is its definition. So, when you want to impose an order, when you want to stop it, it just finds a new purpose. With these attacks, you, bullies, had touched one of the sound box of rock’n’roll. You have justified its existence, proving it to be brighter than any thoughts you ever had. The rockn’n’roll community, our community, immediately came together. Artists from all around the world have expressed their support, along with music labels, tour managers and journalists, all these people I love so much!

Just like the Monty Python’s “The Fish Slapping Dance”, I want to say to you that even if you perpetuate your keystrokes, we will continue to go to all of our favorite bands’ shows. We will continue to promote the merits of “lust for life”, we will continue to organize major festivals, we will continue to give you a great sign of the horns. It is part of our response. What would have been the answer of the CBGB generation? They would have given you the middle finger. Tomorrow, I will intellectualize our movement, but today, in fact, I am just giving you one as well. Our generation will not forget the spirit of rebellion.

The great Hermann Hesse ordered us to “learn to laugh like the Immortals“. That laugh, the power of the Immortals, must be perpetuated as it is the essence of rock’n’roll, The Most Super Invincible Joke in History. The barbarians do not like to laugh? I love it even more. The barbarians do not like to party? I love them even more. I look at you and continue to learn everything I need to be: the opposite of what you are. I will laugh at you, a burger in my hand, a Wayne’s World’s t-shirt on my back (because my world is this one) and my iPod at full speed in which I’ll listen to “Thank God For Sinners” over and over again. I will pray, yes, but I will pray Joey Ramones and Elvis Presley for the beer kegs to be always full (here I am), so that love flows even faster, so we keep on laughing.

You have targeted French youth. Well, if you wanted to deprive us of our lifestyles, “good fucking luck” as John Oliver said. The Revolution flows in our veins, hardened to the sound of indie rock, to the sweat of garage rock shows, to the fluids we share while listening to psychedelic rock. Just like what Leonard Bernstein said, “this will be our reply to violence: to make music more intensely, more beautifully, more devotedly than ever before“.

You know, rock’n’roll taught me a lot. Pavement taught me how far irony can be pushed. The Ramones taught me how beautiful stupidity can be. The Velvet Underground taught me the sexual liberation and the ecstasy of art. And God I live in ecstasies since then! Experimental rock has taught me that the order wasn’t the most beautiful thing. Psychedelic rock taught me that I could escape from this world, not to reach a superior mind, but to go and play with each corner of my soul. Punk taught me not to obey, to only believe in the humidity of a room plunged into darkness, one of those you attacked.

George Carlin, that you hate so much for his atheist believes, also was a rock’n’roll lover, for all these reasons that we share. Please believe me, your souls will forever be followed by his seven dirty words: shit, piss, fuck, cunt, cocksucker, motherfucker, and tits. I say it again while listening to the “Sex & Drugs & Rock & Roll” by Ian Dury, “shit, piss, fuck, cunt, cocksucker, motherfucker, and tits”.



By assaulting rock’n’roll, by attacking my friends who were at the Bataclan, you exposed yourselves to our response. In his Moveable Feast, Ernest Hemingway wrote “if you are lucky enough to have lived in Paris as a young man, then wherever you go for the rest of your life, it stays with you, for Paris is a moveable feast“. The party will always continue. You attacked us on Friday the 13th, we will now be your scarecrow, our joy will be yours Jason Voorhees which will reborn in each of the shows we will attend. And I promise to drink an additional pint in each of them. Cheers. No gods, no masters, only rock’n’roll.

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3 Comments

  • Anonyme

    Merci

  • Norma Desperate

    perfectly stated!! "HAIL, HAIL ROCK & ROLL!"

  • Anonyme

    Voilà le texte que j’attendais de lire.Je comprend toujours pas.Je commençais à me sentir marginale à écouter mes groupes garages paumés ces derniers temps, à considérer les soirées à la Méca comme les meilleures sur Terre tout en constatant que les adeptes du bon rock commençaient à se faire rares.Mais après tout ça c’est avec encore plus de hargne et de fierté qu'on ira pogoter et siroter des bières…merci beaucoup

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