Anachronique : The Jesus and Mary Chain (Noise Pop)


The Jesus and Mary Chain est un groupe anglais formé en 1983. The Jesus and Mary Chain, c’est l’un des groupes sur lequel Still in Rock entend publier un article anachronique depuis la création de cette rubrique. Seulement, il faut savoir comment s’attaquer à ces géants de la musique. Nous y voilà.


The Jesus and Mary Chain est avant tout formé de deux frères, Jim Reid et William Reid. Ajoutez-y deux mecs du quartier de la banlieue de Glasgow d’où ils sont originaires, Douglas Hart à la basse et Murray Galglish à la batterie et vous obtiendrez JAMC. Et puis, il faut y parfaire le tout d’un contexte de crise économique où le chômage fait des ravages, ce qui pousse ces mecs à former un groupe de Rock. Mais rien n’aurait jamais existé si Alan McGee, producteur de My Bloody Valentine, The Libertines et quelques autres, n’avait jamais écouté une cassette du groupe. C’est lui qui organisera son premier concert. Finalement, il signera un ‘record deal‘ après que les seules balances aient été effectuées. La fulgurance du Jesus et du Mary Chain. Cette même fulgurance que l’on retrouvera tout à long de l’existence du groupe, où nombre de concerts n’ont jamais dépassé les 10 minutes.

La musique du groupe a toujours été un curieux mélange de Noisy, de psychédélisme et de particules pop. Six albums studio constituent sa discographie, auxquels il faut ajouter cinq EP et trois anthologies qui regroupent de nombreux singles et B-Sides. En bref, on se retrouve à écouter plus de 200 titres super lo-fi, de quoi faire tourner la tête. Pourtant, une fois extrait les meilleurs titres de JAMC, on se trouve en possession d’un des plus beaux bouquets de l’histoire.

Beaucoup des titres de JAMC sont prétentieux. Et à la hauteur de ces prétentions. Il y a cette complexité tout à fait fascinante qui fait de Jesus et Mary un groupe très difficile à cerner. On y trouve des éléments de Galaxie 500, mais le groupe emprunte également beaucoup à la New Wave de son temps. Parfois, JAMC joue sur le terrain du Grunge, en piétine les codes et en sautant à pieds joints sur sa guitare. Et puis, ce n’est pas non plus pour rien que JAMC a souvent été présenté comme un successeur des Velvet Underground, version White Light. Au final, l’influence de JAMC sur la culture Pop est énorme : sa musique constitue la bande-son de nombreux films, le nombre de compilations qui intègrent certains de ces morceaux s’élève à plusieurs dizaines, et on ne compte plus les grands groupes ayant sorti des covers du JAMC.


Étonnamment, les deux albums les plus cultes du groupe, à savoir Psychocandy (1985) et Darklands (1987), n’emportent pas ma préférence. Le son, très new wave, ne laisse place qu’à peu d’humanité : on est en plein dans la mouvance de la musique industrielle. Certes, on y trouve plusieurs très bons morceaux, “Just Like Honey“, “The Hardest Walk” et “Never Understand” pour le premier, “Darklands” et “Happy When It Rains” pour le second. J’en profite d’ailleurs pour souligner la sortie d’un 7inch consacré au titre “Happy When It Rains“, avec une version démo absolument grandiose.

Barbed Wire Kisses (1988) est la première des anthologies regroupant certains singles et autres B-Sides. Dans l’ensemble, les titres sont assez homogènes et peu sortent finalement du lot. Bien entendu, la reprise de “Surfin’ USA” avec le fuzz habituel de JAMC mérite le détour. 



Suit Automatic (1989), troisième opus studio du groupe. Immédiatement, le son est différent, plus pop. On comprend dès “Here Come Alice” que Jesus est décidé à nous clouer (…). Comme un au revoir aux années ’80, plus titres très rythmés font leur apparition dans la discographie du groupe. La voix de Jim Reid est plus agressive, à l’image de “UV Ray“. Mais l’album reste trop plat, trop pâle.


Honey’s Dead (1992) arrive trois années plus tard alors que Monti y remplace le batteur Bobby Gillespie parti fonder Primal Scream. L’album s’introduit sur un très grand classique du groupe, j’ai nommé “Reverence“. Les paroles qui reviennent en boucle, ‘I wanna die like Jesus Christ‘, sont devenues un symbole du groupe, une phrase reprise dans “Frequency“. JAMC délivre un titre super énergique avec “Tumbledown“, et puis un autre avec “I Can’t Get Enough“.


The Sound of Speed (1993) est la deuxième des anthologies, l’absolu indispensable de JAMC. C’est là que les choses commencent véritablement. Pourtant, il s’agit de la seule anthologie qui ne paraîtra pas aux Etats-Unis. Bizarre. Quoi qu’il en soit, l’introduction se fait avec “Snakedriver“, l’un des TOP 5 de l’histoire de Jesus and Mary. La version acoustique de “Teenage Lust” est super bien pensée, c’est un autre indispensable. Et puis, on retrouve une guitare super accrochante avec “Don’t Come Down” après la pluie printanière de “Why’d You Want Me“. Vient ensuite la fabuleuse reprise du “My Girl” de Temptation. C’est en réalité le titre idéal pour commencer avec ce groupe. Mélodique et accessible, on y trouve surtout la voix de Jim Reid. Enfin, “Tower of Song” (une reprise de Leonard Cohen) nous donne l’une des meilleures pièces de guitare du groupe. L’appellation Shoegaze prend tout son sens.

Trêve de suspens, Stoned & Dethroned (1994) est à mon sens le meilleur opus de Jesus et Mary. Il laisse majoritairement place à une guitare acoustique. Certes, il n’est pas celui qui caractérise le mieux le son de JAMC, mais Stoned & Dethroned contient assurément certaines des meilleures créations du groupe. Si le son est très marqué par la mouvance années ’90, beaucoup rappellent en fait les Velvet. On se retrouve confronté à l’essentiel : une bonne mélodie, un son de guitare saturé et rien de plus. Le premier titre, “Dirty Water“, illustre parfaitement ce que contient cet LP. On retrouve cette même romance sur “Hole” et “She“. “Wish I Could” s’impose comme l’une des créations les plus mélodiques du groupe. La guitare y est splendide. Ce morceau est ce que l’on appelle sans problème une Masterpiece. On y entend le son qui a fait de Monomania, le dernier album de Deerhunter, le meilleur opus de 2013. Et puis arrive “Save Me“, l’une des pièces centrales de l’album. Le son se rapproche de celui de Galaxie 500 sur “Til It Shines“, avec une guitare super shoegaze. Sans oublier un son crunchy à souhait. Ce titre constitue aujourd’hui un classique de la chanson américaine. “These Days” vient nous rappeler le spectre de Johnny Thunders. “Feeling Lucky” vient conclure cet album splendide avec l’une des plus belles pièces du groupe. La guitare y est déchirante.

Hate Rock ‘n’ Roll (1995) est la troisième et dernière anthologie. Elle contient tellement de hits qu’on en perdrait la tête. En fait, cet album est plus un best of qu’autre chose tant il contient de nombreux singles du groupe. On y perd en découverte, les B-Sides sont peu nombreux, mais on y trouve au final ce qui est probablement le tout meilleur LP pour commencer avec JAMC. Bien entendu, l’ouverture sur “I Hate Rock ‘n’ Roll” a de quoi surprendre tant ce morceau est parfait. Ecrit en prémisse au “I Love Rock ‘n’ Roll” du groupe, ce titre est l’un des plus absolus du groupe. Celui qui vient en tête lorsque l’on évoque JAMC. Après une nouvelle lecture de “Snakedriver“, on retrouve le “Something I Can’t Have” de la seconde anthologie. Le titre “33 1/3” apparaît lui pour la première fois. On croit avoir affaire à une ballade pop gentillette, mais en réalité, le fuzz explose par à-coups, c’est splendide. On trouve une belle déclaration d’amour à la ville de New York sous le nom de “New York City“. La rare guitare acoustique de Jesus réapparaît sur “Taking It Away“. Enfin, JAMC rappelle la puissance de sa dissonance sur “I’m In With The Out Crowd“, quasiment pour conclure.

Le dernier LP du groupe est Munki (1998). Un dernier coup d’éclat. Il est étonnant de constater la facilité avec laquelle le groupe a réussi à maintenir une qualité constante au fil des albums. De plus, JAMC n’a jamais véritablement dévié de sa ligne artistique initiale, pourtant, le son du groupe parvient toujours à nous enthousiasmer avec autant de force. Immédiatement, JAMC nous donne un “I Love Rock N Roll” qui marquera son histoire. Vient ensuite “Birthday“, titre énigmatique à la musique pop et aux paroles plus virulentes. Ce titre donne le ton à l’ensemble de l’album : Munki est un LP qui est véritablement cool. Il encapsule d’ailleurs tout ce qui faisait la hype des années ’90. On y entend un fond de grunge, et JAMC donne dans la nonchalance la plus absolue. Les titres y sont longs, plus coulants. Et puis, quelques accords donnent à entendre l’influence de Sonic Youth, comme sur “Commercial“. Impossible de ne pas se plonger avec plein dans la scène américaine de l’époque avec “Never Understood“. “Black” est probablement la meilleure création de l’opus. Ce titre a tout de ceux qui ont marqué la décennie : des paroles facilement saisissables, une musique pop avec un son de guitare pseudo lo-fi. Pour finir, on retrouve le fabuleux “I Hate Rock N Roll“. Un beau titre pour conclure l’histoire du groupe.

Les amis, vous l’aurez compris, l’écoute de The Jesus and Mary Chain est un exercice indispensable. C’est également l’un des exercices les plus évolutifs et les plus merveilleux qu’il soit possible de faire. Il ne fait aucun doute que ce groupe a changé le cours de l’histoire musicale. L’extrême richesse de cette discographie pousse à nous essayer à un exercice nouveau : la création d’un Best of JAMC par S.I.R. Alors, pour conclure cette article, voici JAMC en 13 titres, la crème de la crème :

(tous les titres sont cliquables)

5. Black
10. Birthday

(mp3) The Jesus and Mary Chain – Snakedriver

(mp3) The Jesus and Mary Chain – I Hate Rock ‘n’ Roll

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