Anachronique : Syd Barrett (Psych Pop)

Syd Barrett. Pink Floyd est le groupe que l’on connaît (et franchement pas mon préféré). Son premier album, The Piper at the Gates of Dawn, est paru en 1967. A l’époque, le groupe est surtout mené par Syd Barrett, un ovni musical qui quittera le groupe après la parution de ce premier essai (ou plutôt, qui s’en fera virer car sa consommation de LSD le rendait trop instable…). Après son aventure Pink Floyd, Syd Barrett fera paraître deux opus : Barrett (1970) et The Madcap Laughs (1970). La plupart des titres auront été écrits entre 1966 et 1967. Ils demeurent aujourd’hui parmi les titres pop les plus novateurs de l’histoire.
Il sera difficile de passer en revue l’ensemble des morceaux produits par Syd Barrett. D’autant plus que l’aspect expérimental d’une grande majorité conduirait à écrire plusieurs lignes sur chacun d’entre eux. Toutefois, plusieurs morceaux méritent une attention toute particulière tant leurs mélodies sont éclatantes et leur impact sur la culture pop se fait encore ressentir.
 
The Piper (1967) trouve un souffle nouveau à partir de “Take Up Thy Stethoscope and Walk“, le 6ème morceau. Ce véritable chef d’œuvre de pop expérimental fait probablement partie de ceux qui auront permis à Pink Floyd d’obtenir le statut qu’est aujourd’hui le leur. La reprise de ce titre faite par de Ty Segall et Mikal Cronin sur leur album Reverse Shark Attack mérite d’être particulièrement soulignée (article). S’ensuit “Interstellar Overdrive“, un titre de presque 10 minutes à couper le souffle. Je crois que l’on est là au sommet de ce que la musique psychédélique peut produire de meilleur. Le reste n’est qu’écoutes. “The Gnome” révèle le Syd Barrett de ses opus solo, titre de pop acoustique en apparence très catchy. “Chapter 24” continue dans le genre. “The Scarecrow” aura assurément influencé le double blanc des Beatles, un titre psychédélique difficilement saisissable. La dernière création de Syd avec les Pink Floyd sera “Bike“, un titre pseudo-ironique plus proche de ce que fera le groupe sans Barrett.
The Madcap Laughs (1970) est le premier opus solo de Syd Barrett. L’enregistrement de cet album aura été périlleux : mai 1968, Syd commence à travailler dessus, puis il abandonne le projet. Avril 1969, Syd reprend le travail, aidé par Malcolm Jones. Aidé quelque temps par un membre de The Soft Machine qui quittera ensuite le navire, Syd parvient à finir son travail aidé par Roger Waters et David Gilmour, membres de Pink Floyd. En ressort, assez logiquement, un album très décousu et difficile à appréhender. “Terrapin“, le titre introductif, ne laisse planer aucun doute sur toute la déconstruction musicale de l’album. De façon encore plus révélatrice, “No Good Tryin” alterne entre mélodies pop entraînantes et background psyché assez ardu. “No Man’s Land” surprend par ses arrangements et “Here I Go” par sa mélodie très binaire. Bien entendu, le titre qui ressort le plus de The Madcap Laughs est “Octopus“, l’un des titres les plus connus de toute la discographie Syd Barrett. Il s’agit là d’une perle pop difficilement descriptible. Syd réintroduit immédiatement un peu de confusion avec “Golden Hair“, un titre plus ovni qu’autre chose. Et puis, histoire de complètement brouiller les pistes, la voix de Syd réapparaît sur double piste avec “She Took A Long Cold Look“. On retrouve du Johnny Thunders dans “Feel“, et toute la nonchalance de Barrett dans un “If It’s In You” a fait pâlir de rage tous les couturiers musicaux. L’album se conclut sur un “Late Night” Pink Floydien avec une full instru qui avait disparue depuis plusieurs minutes. En bref, The Madcap Laughs est l’opus le plus étrange de toute la discographie de Syd Barrett. Et c’est dire. C’est aussi son meilleur album, celui qui lui ressemble le plus.
Barrett (1970) s’ouvre sur “Baby Lemonade“, à mon sens l’une des plus grandes créations pop de tous les temps. Ce titre était déjà le premier coup de génie de Syd que beaucoup avaient alors jugé inapte à composer de la musique, trop accroc au LSD pour arriver à ressembler suffisamment d’énergie. De nombreuses versions de ce morceau apparaissent sur les rééditions de Barrett (voir celle EMI de 1994), un must have. Après un “Love Song” très Ringo Starr et un “Dominoes” très Cass McCombs, il faut attendre “Maisie” (un titre à la John Lee Hooker) et “Gigolo Aunt” (un Beatles ?!) pour côtoyer à nouveau le meilleur de Syd. La fin de l’opus est magistralement menée par deux des tous meilleurs titres, “Wined and Dined” et “Wolfpack“, à ce jour l’un des titres les plus connus de Syd Barrett. Enregistré à Abbey Road Studios avec l’aide de Roger Waters et David Gilmour, Barrett est un indispensable, si tant est que ce mot est encore un sens. La seule représentation live de cet album, que Syd donnera le 6 juin 1970, se conclura après seulement quatre morceaux, lorsque Syd prendra sa guitare et quittera la scène.
Après la parution de ces albums, Syd Barrett se retirera totalement de la scène publique pour aller vivre dans la banlieue de Cambridge. D’où le “I Know Where Syd Barrett Lives” de Television Personalities (article). Le nombre d’ouvrages au sujet du toujours très mystérieux Syd Barrett est légion. Syd n’est sûrement pas le “génie perdu de Pink Floyd” comme l’un d’entre eux le titre (un artiste de ce calibre n’est jamais perdu pour personne), mais il est certain que Syd demeure trop peu connu du grand public comparativement à son immense influence sur la scène actuelle. La comparaison peut paraître folle, mais je trouve de nombreuses ressemblances entre la créativité de Syd Barrett et celle de Robert Pollard de Guided by Voices (article) : l’absence totale de concession, un apparent détachement pour des titres structurés et conformes à la règle, de nombreuses mélodies géniales, fouillées et finalement peu exploitées, laissées brutes, à leur état sauvage. Syd, à toi la parole.
Lien afférent :

Post a comment

Your email address will not be published. Required fields are marked *