The Lavender Flu: band for the bands

J’ai tendance à ne plus vouloir écrire sur les groupes qui se disent psychédéliques parce que leur grandiloquence me tape sur le système. Ou plutôt est-ce le manque d’originalité pour accompagner leur ambition qui me tape sur le système. Que Vanilla Fudge soit ambitieux, c’est un fait, mais je les aime comme ça, parce que sa musique va chercher tout le cheesy que les autres groupes ne se sont jamais permis. A l’inverse, lorsque j’entends Night Beats, les Growlers, Allah Las et autres copies conformes d’un original qui doit dater de 1960 mais que l’on a perdu de vue à force d’être pompé, je me dis que je préfère perdre mon temps à faire quelque chose d’autre.


Vous l’aurez compris, The Lavender Flu échappe à cet écueil sensiblement majeur. Certains pourront même lui reprocher son inverse : à vouloir être trop originaux, nombre de groupes se sont perdus dans la musique expérimentale ou m’as-tu-vue, pour le simple plaisir d’être… vu. Si l’idée de cet écueil m’en a toujours touché une sans faire bouger l’autre, je crois que The Lavender Flu y échappe de toute façon. Son deuxième album, Mow The Glass, qui a vu le jour le 6 juillet dernier via le légendaire In The Red Records en est une belle illustration, bien qu’il ne soit pas sans défauts.

Ce qui me frappe dès la première écoute de Lavender Flu, c’est la façon dont la voix est enregistrée. Elle fait un parfait écho avec la dualité de la musique du groupe : il se dit fleuri (regardez son nom, lisez ses paroles) mais il frôle également de nombreuses mélodies obscures. Or, les fleurs la nuit… on ne les voit pas trop. The Lavender Flu avait donc beaucoup à y perdre, et pourtant, il parfait à scorer ce que tous les groupes censés et insensés devraient vouloir atteindre : une balance dans la démesure de chaque côté. “Follow The Flowers” illustre tout cela. 
Dream Cleaner“, hormis un couplet très Sonny and the Sunsets, délivre sa petite ribambelle qui s’installe avec lenteur. On ne sait toujours pas trop bien où The Lavender Flu veut en venir à ce stade.  “Leaking Past” nous donne des indices plus fermes. Le spleen semble envahir les paroles tandis que la musique se maintient sur le bord de la falaise. Malheureusement, “Reverse Lives” a tendance à vouloir nous faire passer l’arme à gauche, peut-être est-ce son envie de lyrisme, ou sa marche militaire, ou la voix nonchalante.
Parce que Lavender Flu évite l’album amorphe, il varie les genres. Et il varie beaucoup ! “Ceiling Of Skin” semble donc laisser part à un élan nineties alors qu’il se tourne rapidement vers une breeze pop qui, enfin, fait échos à l’histoire de cet album “recorded in the living room of a small house on a cliff overlooking the Pacific Ocean“. Il me fait en cela penser à Christian Bland and The Revelators, un sub projet des Black Angels. Et parce que The Lavender Flu est originaire de Portland, il fait dans le weird à tout va. “Like A Summer Thursday” vient donc conclure la face A sur quelques notes calypso qui convaincront tous les passants d’aller acheter des Afflelou pour enfin mieux voir les chemises hawaïennes d’Antoine.

You Are The Prey” est proche de l’univers du dernier Ty Segall & White Fence, ou plutôt, White Fence & Ty Segall. Il accroche pour la première fois, The Lavender Flu est plus flu que lavender. Et “Floor Lord” de venir renforcer cela, pour une fois, la maquette est bien foutue. J’ai toujours pensé qu’il fallait regrouper les titres similaires afin de créer des élans, plutôt que de les disperser afin de faire “varié”. Ça ne viendrait à l’esprit de personne – sauf des cons – de procéder de la sorte en concert. “Just Like Anything” revient dans le droit chemin, plus magie grise que boue punk.
Oh, et puis, qui a dit qu’il ne fallait pas un peu de country ? Certainement pas “Distant Beings“. Quant à “Demons In The Dusk“, il est plus sixties, alors je passe et je me concentre sur l’excellent final, “Ignorance Restored“. The Lavender Flu semble enfin (re)trouver la formule, il cogne sans nous perdre, il nous agrippe sans en rajouter, il est mélodique sans être 60s.


Au final, The Lavender Flu est certes chaotique, mais force est de constater qu’il sait comment exploiter toutes les idées qui sont les siennes. Et celles des autres aussi. Il y a certes un problème de canalisation – que le groupe sorte 4 albums par an comme le fait King Gizzard, chacun dans son style – mais il est rapidement compensé. On frôle parfois la sensation dy tympan qui tourne (similaire à la tête qui tourne), mais ce n’est pas grave parce que nous sommes tous des hippies. The Lavender Flu a au moins l’avantage de confondre les genres au sein même de ses morceaux, ce qui fait qu’ils sont difficiles à attraper, mais au final attachants. Mow The Glass est un très bon album qui fera bientôt partie de cette classe de LPs qui influencent les artistes et les aide à y piocher un peu d’inspiration, ce pourquoi j’ai intitulé cet article “band for the bands”. The Lavender Flu s’adresse-t-il également aux jeunes demoiselles ? Qu’elles me le disent.
(mp3) The Lavender Flu – You Are The Prey
(mp3) The Lavender Flu – Ignorance Restored
TracklistMow The Glass (LP, In The Red Recording, 2018)
1. Follow The Flowers

2. Dream Cleaner
3. Leaking Past
4. Reverse Lives
5. Ceiling Of Skin
6. Like A Summer Thursday
7. You Are The Prey
8. Floor Lord
9. Just Like Anything
10. Distant Beings
11. Demons In The Dusk
12. Ignorance Restored

Liens :
Article sur Sonny and the Sunsets
Article sur Christian Bland and The Revelators

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