Anachronique : Blonde Redhead (Indie Rock)

 

Blonde Redhead est un groupe new-yorkais créé en 1994 et qui est toujours actif à ce jour. La légende veut que ses membres – Kazu Makino et les frères Amedeo et Simone Pace – se soient rencontrés dans un restaurant italien à Manhattan. Très vite, Blonde Redhead travaillera à la production d’un premier album. Il sortira en 1994 sur Smells Like Records, le label de Steve Shelley (batteur de Sonic Youth), et dans la foulée, paraîtra La Mia Vita Violenta.
Il est évident, à l’écoute des premiers Blonde Redhead, que sa musique est parfois similaire à celle de Sonic Youth. Ses deux premiers albums regorgent de sonorités nineties, ils sont expérimentaux, une voix féminine vient former un duo avec une voix masculine, bref, Blonde Youth – ou Sonic Redhead – est un combo qui tient la comparaison. Alors, sans surprise, les fans de l’un des deux groupes aimeront nécessairement l’autre, et si SY est bien évidemment le précurseur dans l’histoire, Blonde Redhead ne doit pas être dénigré, parce que ses morceaux sont souvent novateurs, qu’ils ajoutent en sensualité à la décennie 90s et qu’ils traduisent le spirit de ces immenses années comme très peu d’albums le font.

 

 

(I Am Taking Out My Eurotrash) I Still Get Rocks Off” nous met immédiatement dans tous vns états. Volontairement très aguicheur, il nous emporte avec une belle véhémence que la guitare traduit sans difficulté. Le duo fonctionne à la perfection, nous avons à faire à l’un des meilleurs titres du genre nineties.
Vient ensuite “Violent Life“, le morceau qui a le premier attiré mon attention sur La Mia Vita Violenta. Le son de la guitare, très métallique, rappelle un brin la mouvance de rock industriel des années 80s, et pourtant, Blonde Redhead n’a jamais sonné autant nineties, la faute à des paroles poético-Winona-Ryder-ish – comprenez par-là, un peu artiste maudit avec ses jeans déchirés. On y trouve, comme beaucoup des meilleurs morceaux de cette décennie, le spleen d’une génération pommée, la première de l’histoire à l’être véritablement.
 
U.F.O.” retombe sur les terres de Sonic Youth, version premiers albums. Le son est relativement minimaliste et guidé par une batterie omniprésente. Ça fonctionne parfaitement, ces balades d’indie rock ont disparu de l’environnement, on les écoute donc avec un immense plaisir. Et que dire du final sinon qu’il propulse Blonde Redhead dans les hautes sphères des groupes expérimentaux d’exception.
I Am There While You Choke On Me” rajoute une couche de sado-masochisme, ce que le son lo-fi qui est volontairement posé sur ces deux minutes magnifie. “Harmony” revient à une production plus classique mais Blonde Redhead en profite pour délivrer un morceau tout ce qu’il y a de plus psyché. Et “Down Under” de faire enfin ressortir la sensualité de Kazu Makino, ce qui, à mon sens, distingue le plus Blonde Redhead des autres formations de l’époque.
Bean“, c’est une pièce de craie noire avec laquelle Blonde Redhead dessine des choses creepy. Le riff est super mécanique, ce n’est pas la première fois, preuve de l’influence 80s qui ressort en filigrane. “Young Neil” est pour sa part un hommage inversé, comme son nom l’indique. “10 Feet High” reprend la route d’une musique plus noisy. Yo La Tengo version Electr-O-Pura n’aurait pas dit non. “Jewel” clôt l’album dans une mouvance proto-rock dont l’évidence de la structure contraste avec le travail porté sur les différentes sonorités. Au risque de faire trop puriste, ce titre mérite l’approbation de tous ceux qui se sont un jour intéressés à l’influence du free jazz dans le rock alternatif – dont Frank Zappa est le père… Blonde Redhead aurait pu pousser le vice encore plus loin en prolongeant le morceau de quelques minutes.

 

Le reste de la discographie de Blonde Redhead contient également d’excellentes pièces, même si le groupe, en décidant de s’écarter de la route de Sonic Youth, a produit quelques déconvenues. Mais qu’importe ! Le fait est que les débuts de Blonde Redhead sont à inscrire au panthéon du genre. Le fait est, aussi, que La Mia Vita Violenta est un album sans faute qui fait honneur à la scène de rock alternatif. Blonde Redhead est noir, brutal, parfois emporté (voir son premier titre, “I Don’t Want U“) et toujours sensuel. Peut-être est-il le groupe qui a le mieux défini la turpitude de cette décennie.

(mp3) Blonde Redhead – (I Am Taking Out My Eurotrash) I Still Get Rocks Off (1995)
(mp3) Blonde Redhead – Violent Life (1995)

Tracklist : La Mia Vita Violenta (LP, Smells Like Record, 1995)
1. (I Am Taking Out My Eurotrash) I Still Get Rocks Off
2. Violent Life
3. U.F.O.
4. I Am There While You Choke On Me
5. Harmony
6. Down Under
7. Bean
8.Young Neil
9. Jewel
10. 10 Feet High

Liens :
Semaine spéciale Sonic Youth
Interview Still in Rock avec Thurston Moore

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