Album Review : Real Estate – Atlas (Breeze Pop)





Album Review : Real Estate

Atlas









Real Estate est ce groupe originaire du New Jersey bien connu pour sa musique intemporelle. Son nouvel album, Atlasest son troisième opus, après Days (2011) et Real Estate (2009). Le groupe n’y a pas changé le son qui le caractérise. Il l’a perfectionné. Jusqu’à l’ultime. La voix de Martin Courtney est toujours aussi cristalline, la guitare crée cette légère brise d’une journée de printemps, et la batterie instille un rythme tout juste entrainant. La production y est toujours aussi irréprochable. Tom Schick y est pour beaucoup. Les réverbérations donnent à la guitare d’Alex Bleeker une intemporalité absolue. La poésie de chacun des morceaux, leur tristesse délicatement dissimulée sous un voile ensoleillé, la simplicité de ces quelques minutes qui dansent avec nos sentiments, tout est là pour faire d’Atlas l’un des meilleurs albums de l’année. Ce qu’il sera nécessairement.

Je trouve l’effort mélodique de cet opus particulièrement marqué. Real Estate avait auparavant cette tendance à se laisser aller vers la facilité de mélodies pop très aériennes, mais qui manquaient parfois d’un peu de substance. Avec Atlas, fini tout cela. On sait immédiatement que les titres ont été longuement travaillés, sculptés à force de recherches inventives. 

Est-ce qu’Atlas est meilleur que Days ? Certainement. La breeze de ces titres est intemporelle. C’était d’ailleurs déjà ce qui caractérisait Days, où on oscillait entre éclat de génie et titres plus pâles. Mais cette fois-ci, Real Estate a réduit le spectre des titres plus communs. Il faut dire que trois années se sont écoulées depuis leur dernier opus. Si deux des membres du groupe ont beaucoup fait parler d’eux avec leur autre groupe, Ducktails (article), Real Estate vient finalement réaffirmer sa supériorité. Un tour de bateau et puis s’en va, en avant pour la critique track-by-track.

  • Had to Hear : Real Estate a beau se défendre d’être un groupe de beach music, il est difficile d’imaginer “Had to Hear” être autre que le parfait morceau de notre bande-son de l’été. La troisième guitare qui arrive en fin de quatrième minute complète ce tableau sonore avec la grâce, la volupté, et l’excitation d’un voyage qui commence tout juste. Had to Hear” est le morceau qui met le plus en avant les guitares de tout l’opus. On finit avec un dialogue triparti absolument irrésistible. 
  • Past Lives : On imagine facilement flotter les trois notes qui reviennent en boucle, à la surface d’une eau qui scintille et sent bon le printemps. “Past Lives” n’est peut être pas le titre qui accroche le plus l’oreille, mais il révèle en réalité un Real Estate plus tranchant que ce qu’il l’était avant. 
  • Talking Backwards (ici) Le seul titre dévoilé avant l’heure. Ce single est finalement le morceau le plus rythmé de l’album. La voix de Martin Courtney est teintée de mélancolie, et finalement, ce titre s’impose comme l’un des meilleurs de l’opus, trop évident pour le laisser passer. Et le voyage en compagne de “Talking Backwards” est loin d’être fini. 
  • April’s Song : Plus proche de l’univers de Ducktails que les autres morceaux, “April’s Song” est le genre de titre que l’on peut laisser tourner en boucle pendant de trèèèèès longues minutes. “April’s Song” est balade de pop lo-fi absolument irrésistible. Real Estate est le seul groupe capable de délivrer des mélodies qui regorgent d’autant de soleil. Ducktails doit s’incliner. Seul DIIV, pendant brumeux de Real Estate, saurait prétendre à parvenir à créer un univers si pictural. “April’s Song” est la meilleure création instrumentale de ces derniers mois.
  • The Bend : Si je ne devais en garder qu’un seul, ce serait celui-ci. Assurément l’une des meilleures créations pop de l’année 2014. “The Bend” est un titre parfait. Et lorsque la perfection est là, on se prosterne. Real Estate est le maitre pop lo-fi de la scène actuelle. Indétrônable. Alors, “The Bend“, meilleur titre d’Atlas ?! Yes Sir.
  • Crime : Autre exemple d’un titre en apparence très guilleret qui cache en réalité des paroles lourdes de sens. Atlas est souvent à double visage, celui d’une musique accessible qui donne à penser des tranches de vie plus noires, plus difficiles.
  • Primitive : Ce titre incarne toute la force mélodique de Real Estate. Quelques notes envoyées dans les airs suffisent à créer en nous une véritable addiction. Primitive” est un morceau plus léger que les précédents. Moins prétentieux, plus simplet. Et on l’aime pour ça. Un petit interlude central vient ponctuer ce “Primitive” qui ne cache pas sa volonté d’égayer quelques minutes de notre journée. Comme aucun autre groupe ne sait le faire. Le refrain de “Primitive” est l’un des tout meilleurs de l’album. Arrivée en port pour une ballade nocturne, “when the night is young”, dans l’obscurité d’un rythme sautillant, Real Estate est en embuscade pour nous accompagner tout au long d’une belle soirée.
  • How Might I Live : Le seul titre de l’opus sur lequel Alex Bleeker est au chant. Un petit coup de moins bien. Mais surtout, il manque une pointe de psychédélique qui aurait parfaitement scié à ces quelques accords. On embarque donc à nouveau, direction de nouveaux horizons, alors que le voyage touche à sa fin.
  • Horizon L’Horizon dégagé, du vent plein les voiles, Real Estate renoue avec sa breeze pop légendaire. L’excitation d’un long voyage qui touche à sa fin s’entremêle avec la nostalgie d’un moment encore présent.
  • Navigator On aurait aimé un petit quelque chose de plus pour le dernier titre. Mais “Navigator” est un bon titre qui, finalement, est à l’image de Real Estate : il n’en fait pas des tonnes, il se contente de faire ce qu’il sait faire de mieux, et il finit par nous emporter avec lui. La guitare traduit les derniers scintillements sur l’eau délicatement mouvante du port d’arrivée.

Le mastering réalisé par Greg Calbi (Wilco, Alex Chilton…) est un travail d’orfèvre. Incontestablement, Atlas est un album hi-fi pour les amateurs de sons très clairs. Certes, on perd un peu en éclat après “Primitive“. Non pas que les trois derniers morceaux ne soient pas très agréables, mais Real Estate retrouve des aspects plus humains où son génie lui échappe un peu. Mais il faut dire qu’en réalité, bien que les autres créations dégagent une impression de facilité absolue, elles sont en fait sur le fil entre titres d’une dream pop éblouissante (ce qu’elles sont) et morceaux plus attendus.

En somme, Atlas fait de Real Estate l’ultime groupe de pop à réverbs. Si certains autres groupes lui donnaient la dragée haute, on pense par exemple à Ducktails, Wild Nothing, Woods et Beach Fossils, Real Estate vient de mettre tout le monde d’accord. Atlas frôle la perfection tant la simplicité de ses créations n’a d’égale que leur intemporalité. Résumer cet album en un seul mot n’est pas sans difficile. Universel. Voilà ce qui caractérise vraiment Atlas.



(mp3) Real Estate – The Bend
(mp3) Real Estate – April’s Song

Note : 8,4 / 10 (barème)

Lien afférent :
Article sur “Talking Backwards

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