Si certains artistes s’illustrent par leur capacité à dissocier parfaitement la forme artistique du message, Volage sait faire exactement l’inverse. Sa musique est le plus parfait reflet de la sensation qu’il dévoile, comme s’il exprimait – outre les notes, outre les paroles et outre l’attitude – quelque chose que l’on saisit immédiatement, sans aucune déperdition. Peut-être est-ce la façon de frotter les cordes de la guitare, peut-être est une tonalité qui échappe à son chanteur, peut-être est-ce une réverbération de plus ou de moins, il y a des choses que la musique garde pour elle…
Avec Volage, rien n’est jamais laissé au hasard, et c’est là toute la difficulté de l’exercice. On pardonne facilement à n’importe quel groupe de garage quelques fausses notes, une production un peu en deçà et même parfois des mélodies un peu faiblardes. Rien de tout ça n’est permis avec Volage. Le groupe nous oblige à scruter la moindre variation, ce que l’on fait bien entendu, mais avec un regard à la fois admiratif et concentré. Les deux morceaux qu’il vient de dévoiler l’illustrent tous deux, d’une façon quelque peu différente, mais notons au préalable les quelques points qui semblent les rapprocher. “Spleen” et “Don’t Get Closer” sont une forme d’apologie de la violence impassible, ils sont froids, imposants et nous tombent dessus comme deux blocs de marbre. Ces morceaux ont également pour eux une production digne de ces quelques albums que l’on réécoute quelques générations plus tard en se disant que certains savaient mieux comment s’y prendre que les autres.

Spleen” et “Don’t Get Closer” ont également en commun d’être introduit par quelques notes plutôt minimales. A l’inverse, le premier est encore rattaché à la scène américaine – Calvin Johnson n’est pas loin – tandis que le second a des sonorités plus françaises, époque Gainsbourg. Le premier flirte également avec la folk toujours très noire de Beck – album One Foot in the Grave, la voix de Nathan Roche y est pour beaucoup – tandis que le second est plus post-nineties. Le premier, enfin, est une longue montée qui est finalement assez fidèle au spleen qu’il évoque tandis que le second est plus fractionné. Les deux sont étincelants.

Il y a toujours eu quelque chose de très “grave” dans la musique de Volage, c’est d’ailleurs ce que me confiait Paul Rannaud à l’occasion d’un récent interview. Les deux morceaux de son nouveau 7inch ne font jamais que le confirmer. Ils indiquent une direction artistique plus difficilement perceptible que n’étaient celles de ses premières créations “garage rock” ou de son EP très folk. Avec Spleen, Volage fait dans un style qui fait danser différents styles et différentes époques. L’album qui sortira bientôt ne s’est jamais fait plus attendre.



Liens :
Article sur son EP Coffee Dreamer
Article sur son album Heart Healing

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