EP Review : Volage – Coffee Dreamer (Raw Folk)

Volage. Ça fait un moment que c’est dans les tuyaux : Volage va sortir un EP acoustique. Un peu comme l’a fait Cardboard avec son excellent EP II, Volage allait donc s’essayer à un style musical différent. Et l’on sait l’exercice être périlleux. Dee Dee Ramones ne s’était-il pas cassé les dents sur un album de hip hop ? Standing in the Spotlight s’était transformé en Standing in the Garbage. C’est bien aussi, mais peut être pas l’objectif recherché par Volage. Précisons, une fois encore, qu’ils sont peu nombreux les artistes à exceller dans deux styles différents. Paul Rannaud, le chanteur, a plusieurs fois démontré qu’il était un artiste hors pair et multi-talents, mais allait-il parvenir à maintenir le flux sur un EP de folk ? Le groupe allait-il pouvoir se transcender à l’aide d’un autre univers ?

Cet EP du groupe français paraîtra finalement le 11 mars prochain, via Howlin Banana Records / Fuzz.Tape.Music (le projet de Paul). Sur les terrains de la folk brute, parce qu’il se tient éloigné des albums mélo-dramatico-noioso que la folk pousse parfois à délivrer, cet EP n’imite pour autant jamais l’un des tous meilleurs opus du genre, je pense à One Foot In The Grave de Beck Hansen. Il ne flirte pas plus avec la folk sud-américaine de Juan Wauters. Volage tente l’expérience d’un voyage folk nouveau sur fond de quelques morceaux que nous connaissions déjà. Peut-être peut-on parfois se rappeler Sleeper – à mon sens le meilleur LP de Ty Segall, surement est-ce la façon de frotter la guitare comme une électrique, mais c’est bien tout.

Coffee Dreamer” introduit la marche. La façon qu’a Volage de relancer chaque refrain fait penser à Neutral Milk Hotel, version In The Aeroplane Over The Sea. Peut-être est-ce l’effet créé par les pointes de dissonances, peut-être est-ce les envolées lyriques, la façon dont le refrain et les couplets s’entremêlent. Quoi qu’il en soit, les premiers pas de Volage dans la musique folk sont majestueux. Vient ensuite “6H15” que l’on connaissait déjà pour être le premier titre de Heart Healing. La façon dont le timbre de voix de Paul Rannaud est couplé avec la guitare sèche nous rappelle celle que pouvait avoir Chris Bell d’amorcer plusieurs de ces titres. Volage y est déjà majestueux.

Not Enuff“, un titre issu de Maddie EP (lien), est l’un des titres les plus rythmés de cet EP, comme-ci Bill Fay avait retrouvé le sourire. Volage démontre une fois encore la qualité du songwritting, les titres que l’on peut transposer d’un genre à l’autre en excellant dans chacun des deux se font rares. A moins que ce ne soit simplement le fait d’un talent de réarrangement. Volage, vous nous feriez une version folk des Ramones pour un petit b-side ? Allez… !

Cowgirl In The Sand“, c’est une reprise de Neil Young, l’un de ses classiques. Il fallait oser. La production est terriblement bonne, et si l’introduction avec ses airs de country music (à la Tony Joe White) donne le La, on se laisse finalement séduire par les quelques couplets à trois voix. Je n’ai pas souvenir d’avoir entendu une si bonne reprise de l’auteur d’Harvest depuis bien longtemps.

Nous connaissons également “Upset” pour être de Heart Healing. Le titre trouve une seconde vie et il nous faut quelques secondes pour établir le lien. Une fois encore, Volage présente deux visages distincts de sorte que l’on oublie l’ancien, à la façon du Joueur d’échecs de Zweig. Je profite par ailleurs de ce morceau pour l’écrire avec le plus de simplicité possible : la voix de Paul Rannaud est superbe. On le relève trop peu mais elle a cette confiance qu’avait Nilsson, une véritable délection. Quant à “Owl” (version originale), du nom de l’un des plus beaux poèmes jamais écrit, il nous berce quelques secondes encore dans le doux rêve que formule Volage.

Il faut bien comprendre que Coffee Dreamer, c’est le bébé d’un groupe qui a décidé d’auto-financer quelques titres avec l’argent de ses tournées. Coffee Dreamer, c’est une petite échappée dans un monde de brut, une fleur dans un magma de garage rock que l’on aime être toujours plus brûlant. Finalement, Volage excelle tellement à l’exercice qu’on aurait aimé plus d’originaux. C’est la rançon du succès : produisez une musique de haut vol, créez des attentes, laissez reposer la pâte au frigo et écoutez le public en demander toujours plus. Quoi qu’il en soit, il repartira sur la route du garage en 2017. Et d’ici à, on continuera à se dire que s’il ne devait en rester qu’une petite poignée, Volage en ferait incontestablement partie.

Liens afférents : 

Article sur l’EP II de Cardboard
Article sur One Foot In The Grave 

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