Fugazi. Voyez ces gueules d’assassin ? Il s’agit de Fugazi, groupe de War Punk formé à Washington en 1987. Acronyme du “Fucked Up, Got Ambushed, Zipped In” de la guerre du Vietnam, Fugazi est aujourd’hui reconnu comme un véritable groupe légende, un des instigateurs du mouvement punk de la ville de Washington, un pionnier de l’anti-war. Oh, mais ce n’est pas tout. Le groupe était également anti-industrie de la musique, anti-business et anti-anti. Tout, sauf anti-musique bien lourde. Fans de Sonic Youth, des Ramones, Wire et autres groupes de punk nineties, cet article est le vôtre.
Seulement six opus studios composent la discographie de Fugazi, de Repeater (1990) à The Argument (2001). Mais l’article du jour portera sur 13 Songs, une compilation des deux premiers EP du groupe (Fugazi et Margin Walker) paru en 1989. Nous nous apprêtons à explorer les fonds les plus obscurs de la musique hardcore. Rares sont en effet les groupes capables de dégager une telle énergie. Fugazi se distinguait tout particulièrement par sa capacité à déterrer toute l’adrénaline de son auditeur. Ce groupe transcendait. Et transcende. Pour cette raison, les concerts du groupe étaient toujours très fédérateurs, ouvert à tous, à un prix accessible, pour une musique qui à toujours fait l’unanimité des audiences (ne manquez pas ce gif).Chaque écoute de 13 Songs me plonge en plein dans ces ambiances noires et guerrières des années ’90, de ces conflits oubliés. Fugazi symbolise cette génération d’artistes qui s’engageait dans une mouvance peace and love en laissant de côté le combat par les fleurs, prenant les guitares à la main pour envoyer des missiles sonores dans les oreilles de son auditeur. Fugazi représente cet ultime paradoxe d’un groupe qui cherchait à galvaniser l’auditeur pour lui faire admettre l’horreur militaire.

L’album s’ouvre sur la base de “Waiting Room“, un titre déjà très puissant, simple et dévastateur. Et puis, on se dirige vers “Bulldog Front” : plus qu’une chanson, un hymne. “You want to figure it outttt“. A mon sens l’un des meilleurs titres de l’histoire du groupe, et probablement du Punk. Si “Bulldog Front” ne vous fait aucun effet, passez votre route. “Bad Mouth“, troisième sur la liste, est un titre de War Punk plus classique. Un bon son lo-fi, de la fuzz, Fugazi fait le job. “Burning” fait dans la même veine. Un titre à voir en live, assurément. On retrouve ce qui fera le succès des Fugazi sur “Give Me The Cure“. Un titre noir, inquiétant, et surtout, absolument indécis. La guitare explosera, c’est une certitude. Oui, mais quand ? Une fois encore, ce titre représente les heures les plus brillantes des Fugazi.
Arrive ensuite “Suggestion“. Et là, tout s’arrête. Du même acabit que les meilleurs titres de Country Teasers, ce morceau est l’un des meilleurs titres punk de l’Histoire. Que rajouter ? Rien de mieux pour dynamiter une soirée, s’en aller déterrer quelques esprits ou mourir sur son canapé. “Suggestion” est de ces morceaux qui s’imposent immédiatement. On est dans la Blank Generation de Richard Hell, et ca se sent. “Glue Man“, anti-fillette, à de quoi filer des boutons aux âmes les plus sensibles. Ian Svenonious n’est jamais loin, on ne saurait s’en étonner. Il a d’ailleurs écrit les propos introductifs au très beau The Fugazi Photographs of Glen E. Friedman. On attaque le dernier tiers de 13 Songs avec “Margin Walker“. Le groupe continue dans l’hymne anti-guerre avec “And The Same“, un morceau plus expérimental que l’habitude. Le très Nirvana “Burning Too” est un bon petit teaser au “Lockdown“, l’un des titres les plus noirs de l’opus. Sur des “Promises” très incertaines, Fugazi boucle la boucle d’un opus qui marque son auditeur.Je vous conjure de ne surtout pas vous arrêter à l’écoute du 13 Songs. Il s’agit probablement de l’album le plus emblématique des Fugazi, mais les autres LPs du groupe méritent d’y consacrer/sacrifier quelques neurones. Pour s’en convaincre, il n’y qu’à voir l’interprétation live de “Turnover“, organisée en 1991 pour protester contre la Guerre du Golfe. Fugazi, c’est les heures les plus noires de Still in Rock, à la Gang of Four (article). Un groupe qui aura laissé derrière lui une sacrée empreinte.

(vidéo avec Amy Pickering en guest, membre du groupe Fire Party)
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1 Comment

  • LaTouf

    Merci ! et presque emmerdé de ne pas connaître ça avant. Pearl Jam en avait des reprises trouvables dans des bootlegs, in the good old times. Et impossible alors de savoir ce que c'était. 1 problème important résolu aujourd-hui grâce à toi.

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