Album Review : Wavves – Afraid of Heights (Surf Punk)






Album Review : Wavves 

Afraid of Heights


Wavves. On a tous en tête ces images des skateparks californiens entourés de palmiers. On a tous en tête ces longues allées qui mènent vers Hollywood, les images des quartiers dépravés de Silver Lake où les boutiques de tattoo jonchent les rues par dizaine. Wavves vient de délivrer l’album symbole de cette Californie-là. Afraid of Heights sera désormais le fer de lance de cette nouvelle génération de rockeur, un témoignage de ce qu’était la west-coolitude durant la décennie ’10.  


Cet opus, paru le 26 mars sur le label Mom + Pop, est délivré par Wavves sans aucune concession, à quoi bon. Les sons s’enchaînent parfaitement, une merveilleuse glue musicale aussi attirante que le soleil de Californie. Cet album est plus grunge que les précédents, on y retrouve toutes les puissances des années 90, une voix qui rentre toujours très rapidement dans le vif du sujet et des morceaux qui s’assument pleinement. 


Afraid of Heights est absolument fascinant pour mainte raisons. L’une d’entre elles est la capacité de chacun des morceaux à cogner très fort dès la première écoute, et pourtant, d’avoir un travail studio clairement monumental qui lui donne une longévité que l’on ne soupçonne probablement pas encore. De loin la meilleure création de Wavves, Afraid of Heights est un très, très, très bon opus. Que l’on ne s’y trompe pas, Wavves vient d’abattre tous les clichés du genre. Si le Surf-Punk a souvent la réputation d’être pour être une musique catchy et nécessairement éphémère, Wavves vient ici de démontrer que ce genre-là peut atteindre les sommets de la musique, tous genres et toutes époques confondus. A l’image du Bloom de Beach House qui aura l’an dernier sublimé la Dream Pop,  Afraid of Heights est ce qui peut se faire de meilleur en matière de surf-punk. Outre une pochette d’album qui ressemble curieusement à celle du premier album d’Arctic Monkeys, il est un devoir que Afraid of Heights claque de la même façon.


Ce n’est pas un hasard si l’on connaît rapidement peu ou prou toutes les paroles de Afraid of Heights. Wavves a trouvé une superbe mélodie pour chacun des titres, du genre qui donne envie de s’approprier chaque recoin de sa musique. Il est rare d’avoir à ce point envie d’être familier avec une musique, ressentir le besoin si pressant de la posséder. Enivrant, cet album devrait être vendu avec une notice explicative, un avertissement quant à son caractère grisant. Place à la critique détaillée :

  • Sail To The Sun (ici) : Le premier single, celui qui a créé l’espoir d’un opus exceptionnel, le début de cette grande histoire d’amour. “Sail To The Sun” est un morceau où les riffs sont trempés dans un fuzz ensoleillés, donnant à écouter quatre minutes absolument géniales.

  • Demon To Lean On (ici) : Deuxième morceau déjà connu, “Demon To Lean On” n’en fini pas de se dévoiler. Une fois passées les quelques secondes d’introduction, la voix de Nathan Williams occupe tout l’espace sonore. L’arrivé d’une guitare supra-heavy n’est pas pour décevoir, d’ailleurs agréablement doublée par quelques riffs très 80′. De plus, les échos posés sur la voix à l’approche de la quatrième minute sont exactement là où il le fallait.

  • Mystic : Mais pourquoi ce titre est-il si court ? Il devrait être interdit de produire des chefs-d’oeuvre sans les prolonger de longues minutes durant. Lorsque Wavves se décide à expérimenter dans des sons caverneux, le résultat est époustouflant : le Punk originel du groupe agrémenté de quelques guitares grungy est un cocktail détonnant.

  • Lounge Forward : Un autre titre exceptionnel. Dans le genre Wavvien le plus pur, “Lounge Forward” est un marasme sonore absolument grandiose. Difficile de s’accrocher à la puissance du final.  “Lounge Forward” n’est pourtant pas le morceau qui s’impose immédiatement. Après plusieurs écoutes de Afraid of Heights, il finit toutefois par montrer son réel visage : un morceau à la limite de la Power Pop/Power Punk, éclatant, exaltant. C’est sensationnel. 

  • Dog : Un morceau qui arrive à point nommé. Temporisant à la perfection, la voix de Nathan est plus encore mise en avant. La surprenante arrivée des guitares acoustiques crée son effet. Ce titre perce notre esprit sans la moindre difficulté, le refrain demeure très longtemps en tête. Son aspect plus brumeux, comme annonçant l’arrivée d’une tempête tropicale, fait de Afraid of Heights est un opus riche, varié, encore plus grand. Plus blanc que blanc, plus grand que grand.

  • Afraid of Heights : Le fameux titre self-titled. Voilà que l’on repart déjà en croisade. “Afraid of Heights” est un morceau à mi-chemin entre ce que Wavves fait de plus puissant et de plus soft. Une place très importante est donnée au refrain. Paroles nineties, sûrement les plus notables de l’opus, “Afraid of Heights” est sans aucun doute l’un des morceaux majeurs. Alors que le titre semble être fini à 3min50, Wavves nous réserve une belle surprise psychédélique. Archétype du titre de surf-punk accompagné d’une guitare vigoureuse, “Afraid of Heights” est là ou il le fallait, quand il le fallait.

  • Paranoid : Après les très fortes émotions suscitées par les six titres précédents, il est difficile de croire que Wavves pouvait continuer sur la même lancée. Et pourtant. “Paranoid“, moins évident et en apparence plus linéaire, est en réalité une merveille du même acabit. L’introduction est un autre tour de force, preuve de la maturité de Wavves. On fonce dans la mélodie sans aucune retenue, c’est direct, vif et cinglant.

  • Cop : Sûrement le seul morceau un poil en deçà. “Cop” est un bon titre de Surf-Punk qui tempère agréablement l’opus. La mélodie n’est peut-être pas aussi redoutable que les autres. Mais bon, beaucoup de groupes de la même scène pourraient s’en contenter comme single.

  • Beat Me Up : Wavves qui repars de l’avant avec un morceau admirable. On retrouve un Wavves teenager, sorte de bohème californienne où les problèmes n’en sont pas vraiment. “Beat Me Up” est un poil trop court, le deuxième plus short de l’opus, mais la batterie parvient malgré tout à nous emmener avec elle.

  • Everything is My Fault : Clairement plus expérimental, “Everythign is My Fault” est un morceau que l’on ne l’avait pas vu venir. Les échos portent la voix de Nat très profondément dans notre inconscient. Lorsque le groupe fait parvenir une nouvelle percussion à 1min13, on se dit que Afraid of Heights est une réelle merveille. C’est vaporeux et indécis.
  • That’s On Me : Une introduction quasi jangle-pop, un morceau tout aussi étourdissant. “That’s On Me” est un titre comme chaque album on a besoin. Nathan y reprend clairement les devants.
  • Gimme a Knife : Wavves en remet une couche. Si jamais nous doutions encore de la power-attitude de Afraid of Heights, “Gimme a Knife” est là pour nous prouver que le réservoir à mélodies est grand, et que Wavves est loin d’être au bout du rouleau. Le son de la guitare, très saturé,  arrive par intermittence, c’est punk, c’est grand, c’est Wavves.
  • I Can’t Dream : Grandiose conclusion. Plus proche de “Everythign is My Fault” que les autres, “I Can’t Dream” est une pièce de surf expérimentale comme on ne peut en entendre nulle part ailleurs. Plus long morceau de l’opus, Wavves nous embarque en dehors de sa zone de jeu habituelle, pour nous montrer que le reste de San Diego, c’est tout aussi bleu et fleurissant. Le style de “I Can’t Dream” me fait penser à “Sun’s Coming Up“, le titre conclusif de l’album Lonerism de Tame Impala. C’est dire.

Il est absolument certain que Afraid of Heights nous accompagnera de longues années durant. Si les Beach Boys sont un des meilleurs groupes à écouter durant l’hiver, on peut désormais en dire autant de cet opus. Comment nier son enivrement. L’extrême qualité de cette musique ne peut que pousser aux extrêmes, quand le temps sera venu d’un grand soleil, écouter Afraid of Heights nous projettera dans une sphère où la lumière est si intense que l’on s’y brûlera les pupilles. Oui, Afraid of Heights fait dire n’importe quoi, mais les limites ici n’existent plus. Il s’agit d’une simple réaction chimique, Afraid of Heights est trop électrisant, cette musique monte rapidement à la tête, un véritable danger.

Beaucoup de titres composent cet opus. Trop ? Certainement pas. Seulement, écouter Afraid of Heights peut nécessiter d’être plus patient encore qu’à l’habitude. Si l’on recherche toujours instantanément des mélodies puissantes qui pourront décoiffer mémé, ce que l’on trouve ici sans difficulté, Afraid of Heights recel de bien d’autres qualités. Les derniers morceaux présentent le même intérêt que les tout premiers, il faut simplement parfois commencer la lecture de l’opus par ceux-là, histoire de leur donner une oreille neutre et sans sifflement. Il est ainsi inévitable de commencer par préférer les six premiers morceaux, mais c’est là une chance qui nous permettra de redécouvrir encore cet opus lorsque nos petits enfants fouilleront dans nos vinyles. Oui, papi a vécu la sortie de cet opus. 





Note : 9 / 10 (barème)




(mp3) Wavves – Sail To The Sun 
(mp3) Wavves – Demon To Lean On 

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