LP Review : Kikagaku Moyo ‎- House In The Tall Grass (Post Psych-Pop)

Kikagaku MoyoC’est avec surprise que j’aie constaté l’intérêt qu’a généré mon article sur la musique indépendante japonaise des années 1970. Alors, par souci d’hédonisme, me revoilà avec l’album review d’un groupe japonais bien connu des lecteurs de Still in Rock : Kikagaku Moyo. Interviewé en 2013 (et en 2015), Kikagaku Moyo est devenu l’un des véritables piliers de la musique psychédélique japonaise. Il vient tout juste de faire paraître son nouvel album, House In The Tall Grass via Guruguru Brain, le label créé par le groupe

Plus doux que ses précédents LPs, ce dernier est l’occasion de découvrir un Kikagaku Moyo apaisé. Et cette sérénité lui va à merveille, House In The Tall Grass regorge de petits jams de bedroom pop qui font parfaitement écho à la nuit d’encre de la pochette. On doit probablement cela à la façon qu’a le groupe d’enregistrer ses albums : une prise, une seule. Kikagaku Moyo laisse une grande place à l’improvisation et House In The Tall Grass laisse apparaître des traces de cette volonté de ne jamais céder à ce qui est attendu. Là se trouvent forcément les défauts du groupe qui a parfois tendance à nous laisser de côté, mais il n’en demeure pas moins que le résultat d’ensemble est super convaincant.

Kikagaku Moyo a toujours autant le sens des grandeurs, c’est ce qui ressort de “Green Sugar“, un premier titre de presque 8 minutes. Étonnement pop, ce morceau est l’occasion de se parer de tubas et de masques de plongée avant la grande descente. “Kogarashi” précise l’univers de cet LP : des sonorités éparses et des voix à l’aspect quasi-ecclésiastique.
Old Snow, White Sun” est plus expérimental que les précédents. Ce titre, relativement bien fourni, a pour lui de nous rappeler ces espaces sonores d’ambiance sur lesquels on a (ou pas) l’habitude de se laisser aller. Une chose est sure, ce trio introductif est tout à fait surprenant. Kikagaku Moyo a pour l’heure troqué son rock’n’roll psyché avec une post-pop inattendue. Vient alors “Melted Crystal” qui nous fait patienter 5 minutes durant et c’est “Dune” qui réinjecte un peu d’entrain dans cet album. Kikagaku Moyo est toujours aussi déterminé à ne pas utiliser de voix, comme pour encore plus universaliser sa musique. Ainsi se conclut la première moitié de l’album.
Les deux titres qui suivent sont l’œuvre de Go Kurosawa. “Silver Owl“, c’est une véritable épopée de plus de 10 minutes qui vont aller très loin. Kikagaku Moyo captive à nouveau notre attention. Son léger psychédélisme est habillé de sonorités japonisantes qui forment un reflet sur l’image du groupe. Le dernier tiers finit par exploser, le moment que l’on attendait depuis les premières secondes de cet LP. Kikagaku Moyo a su garder pour l’instant le plus adéquat. “Silver Owl” s’en trouve sublimé. 
Trad“, dans un autre style, joue sur le côté planant de cet album, sorte de pop spectrale venue d’ailleurs. Et puis, comme le précédent, Kikagaku Moyo casse la structure qu’il venait de mettre en place pour laisser un peu d’espace à du rock’n’roll bien trouvé. Hello Sonic Youth, hello influence américaine, nous te souhaitons la bienvenue dans la musique de ce groupe.
Cardigan Song” est une petite balade folk qui conclut agréablement notre petite escapade. Kikagaku Moyo y est très modéré, les arpèges forment une dernière expérience aux confins d’une musique à laquelle on n’a décidément pas l’habitude d’être confronté. Kikagaku Moyo maintient ses ambitions minimalistes.  

Fidèle à la tradition psychédélique japonaise, on trouve de nombreuses traces de folk dans la musique du groupe. Au final, House In The Tall Grass est un album très poétique, sorte de musique pop post-psychédélique en ce sens qu’elle en reprend plusieurs codes dont elle joue souvent. Et puis, la musique de cet album est étonnement minimale, ce qui est généralement assez antinomique à la musique psychédélique qui est par nature beaucoup plus fournie. C’est l’apport de cet album. 
Kikaguku Moyo nous avait surpris pour son rapport constant à la nature dans son premier album, il nous captive cette fois-ci avec des créations plus rêveuses. Le clergé ferait bien de s’inspirer de ces quelques douceurs s’il voulait requérir l’esprit de ses fidèles. En attendant, Kikaguku Moyo étend son empire à la vitesse grand V, preuve que sa musique est toujours aussi remarquée. Que le groupe ne se fasse aucun souci, il conserve haut la main son statut de groupe japonais le plus prometteur. 
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