Album Review : Devendra Banhart – Mala (Indie Pop Folk)


Album Review : Devendra Banhart

Mala

— FRENCH VERSION

Devendra Banhart. Difficile d’avoir quelques secondes à soi en ce début d’année 2013, les opus pleuvent de tout côté, les nouveaux groupes arrivent de tout bord. Mala est celui que l’on attendait. Peu d’artistes prennent le temps de délivrer leur musique. Peu d’artistes demandent autant d’exigence à l’écoute, la nécessité de se passionner pour l’art qu’ils présentent à nous. Devendra est de ceux-là.

Cela faisait 4 and, depuis What Will We Be, que l’on attendait un nouvel opus studio de Devendra qui sortira le 12 mars prochain. Pour réaliser Mala, Devendra s’est équipé d’anciens matériels hip-hop. “And knowing my songs are not hip-hop whatsoever, we thought it would be interesting to see how these kinds of songs would sound on equipment that was used to record our favorite rap.” Accompagné de Noah Georgeson à la guitare, Bram Inscore à la basse (aussi celui de Beck) et Josiah Steinbrick (accompagnant parfois Charlotte Gainsbourg), Mala avait tout de l’opus réussi. Et il l’est.
Mala est le Jardin botanique de Devendra, fait de mille couleurs, de dizaines de saveurs. On y savoure la délicatesse des fleurs qui le compose, chacun des titres ayant une odeur différente, un attachement particulier. La voix de Devendra s’apparente toujours autant à celle d’un oiseau posé sur une brindille, intégrant parfaitement cette musique suave et longiligne. Il est difficile de rêver meilleure écoute de Devendra qu’autour d’un feu de cheminée avec quelques amis. Sa musique est un enchantement qui a le don de mettre tout le monde d’accord : c’est poétique et mélodieux, toujours un plaisir. L‘écoute de cet opus pousse à la création, à l’émerveillement. Place à la critique détaillée : 

  • Golden Girls : La première phrase à peine prononcée et l’on comprend tout : cet album va être un véritable enchantement. Légèrement parfumé à la pop façon Devendra, “Goden Girls” est aussi subtil que possible. C’est court et affriolant, un titre complexe et raffiné.  
  • Daniel : Voilà le premier excellent morceau de l’opus. Sur des allures jazzy, Devendra délivre une pièce florale très douce. Le frêle frottement de la guitare donne à “Daniel” de belles couleurs, scintillantes. 
  • Für Hildegard von Bingen (ici) : Premier titre dévoilé, “Für Hildegard von Bingen” est une belle pièce pop. La résonance métallique et la retenue de ce morceau sont révélatrices de toute la discrétion avec laquelle opère Devendra.
  • Never Seen Such Good Things : Lorsque la voix gracile de Devendra accompagne sa musique, le tout s’appelle “Never Seen Such Good Things“. Non sans humour, ce morceau est l’ensoleillement de ce beau jardin dans lequel nous nous trouvons. Sans fioritures ni artifices quelconques, voilà quelques minutes est d’une incroyable justesse.
  • Mi Negrita : Premier titre dans sa langue natale où il y joue les grands charmeurs, toujours un plaisir. Très distingué, le chic de Devendra trouve ici traduction dans un morceau qui siéra parfaitement à nos premières soirées printanières. Un authentique patio de tranquillité
  • Your Fine Petting Duck : Certainement pas le meilleur titre de l’album, mais tout aussi fleuri que les autres, “Your Fine Petting Duck” est à conserver. Que dire en revanche de ce final ridicule, sorte de musique électronique assurément indigne de son talent. C’est une horreur qui ne mérite pas le nom de musique. Faisons comme-ci de rien n’était.
  • The Ballad of Keenan Milton : Revoilà le Devendra qu’on aime, l’enchanteur au masque de lilas. “The Ballad of Keenan Milton” est une belle interlude, proche d’une source d’eau tout aussi subtile que nécessaire.
  • A Gain : C’est la voix brûlante et courtoise que Devendra s’approche de nous. “A Gain” est un brin nostalgique, sûrement est-ce une Pensée. Plus mélancolique, on s’approche ici d’un moment plus pondéré.
  • Won’t You Come Over : Assurément l’une des plus intéressantes créations de l’opus. “Won’t You Come Over” est la dose de soleil dont le Jardin botanique Mala avait à nouveau besoin. L’instrumentalisation, très analogique, est surprenante et intéressante. On y entend le matériel hip-hop pour la première fois de manière si prononcée. Aucune précédente création de Devendra ne s’en approche, c’est étonnant et magnifiquement fait. Le mélange des genres est radieux.
  • Cristobal Risquez : Cristobal est une formidable illustration de ce qu’est Mala. L’analogique fait à nouveau son apparition. Ce son électronique qui surgit délicatement accompagne l’engouement d’un Devendra très guilleret. Efficace, encore.
  • Hatchet Wound : Un titre plus expérimental qui colle rapidement à la peau. “Hatchet Wound” évolue sur deux phases distinctes, et lorsque celle plus vive réapparaît, une seule envie se fait : sourire et se laisser aller. 
  • Mala : “Mala“, comme Devendra c’est si bien le faire, est une formidable transition qui n’appelle pas plus de commentaires que ce que l’écoute révèle.
  • Won’t You Come Home : Après l’invitation à venir over, celle de la maison. Pour ce, retour à la musique plus habituelle de Devendra. La paresse de “Won’t You Come Home” ne saurait cacher l’engouement que l’on lui porte. Les reverbs de la guitare donnent à nouveau à écouter un beau moment de musique.
  • Taurobolium : La parfaite conclusion. “Taurobolium” fait souffler une légère brise sur Mala, faisant danser les fleurs de ce jardin enchanté. Le final s’apparente à une marche d’au revoir, le rythme s’accélère petit à petit tel le souffle du jardinier qui, accélérant la cadence, s’éloigne pour une journée.

Devendra élève assurément la musique au rang d’art premier. Chaque sonorité semble avoir été réfléchie pendant de longues semaines. Ce huitième album est la démonstration d’une parfaite maîtrise de sa musique, sûrement sa création la plus aboutie. La magie de Devendra est de parvenir à créer des opus qui ne lasse jamais. A croire qu’il fait appel à trop de délicatesse pour que l’on puisse véritablement s’y habituer. Fait d’un raffinement sans nom, la subtilité de chacune des compositions ne peut laisser de marbre. Devendra est un magicien fleuriste comme on n’en rencontre pas d’autre. Il a ici incontestablement gagné en constance. Chaque titre a la place qu’il mérite, chacun présentant un attrait particulier.  


Beaucoup de titres composent cet opus. Inutile de chercher à tous se les approprier immédiatement, le mieux est de procéder par phase, sélectionner certains d’entre eux et s’y cantonner quelque temps. La seconde partie de l’album, après “Won’t You Come Over“, est assurément plus analogique, on y entend l’utilisation du matériel hip-hop que j’évoquais précédemment. Le résultat, inattendu, est très convaincant. Les amis, voilà qui est dit. 

Note : 8,1 /10 (barème)



— ENGLISH VERSION

Devendra Banhart. There’s been no time to rest since the start of 2013, with new albums raining down on all sides and new bands arriving every minute. Mala is the album we’ve been waiting for. Few artists take the time to truly deliver their music. Few artists demand our full and close attention, our passion for the art that they give us. Devendra is one of these artists.

It’s been 4 years—since What Will We Be—that we’ve been waiting for a new studio album from Devendra. To make Mala, Devendra equipped himself with old gear that had been used to make hip-hop in a previous life. “And knowing my songs are not hip-hop whatsoever, we thought it would be interesting to see how these kinds of songs would sound on equipment that was used to record our favorite rap.” Accompanied by Noah Georgeson on the guitar, Bram Inscore on bass (of Beck fame), and Josiah Steinbrick (sometimes accompanied by Charlotte Gainsbourg), Mala has all the makings of a great album. And it’s just that.

Mala is Devendra’s botanical garden, composed of thousands of colors and scents. We savor the sweetness of its flowers, each song with a different odor, a distinct aura. Devendra’s voice manifests itself throughout like a bird on a branch, perfectly woven in the smooth, slender music. His music is so enchanting we get the sense that it could put the world at peace: poetic, melodious, and always a pleasure. Lecture, expositions, ou simple ballade, all these activities lend themselves marvelously to listening to Mala.

Devendra transforms music into a primal art. Each sound seems to have been labored over for weeks, and this eighth album demonstrates a perfect mastery of his music. Certainly it is his most accomplished effort yet. There is a magic working here to make songs that will endure. Made of a nameless finery, the subtlety of each of the songs is carved in stone. Devendra is a magician-florist like no one else. It’s obvious that here he’s gained an indisputable permanence. Each song here has earned its rightful place, each with its own attraction. The enjoyment he took in making this album is palpable.
There are a lot of songs on this album, and it’s useless to try to appraise them all at once. Better to tackle them in phases, restricting yourself to a few at a time. The second part of the album, after “Won’t You Come Over”, is certainly more analog, and it’s here we find exploration of the old hip-hop gear I mentioned above. The result is unexpected, and very convincing. Les amis, that’s all there is to say. 





Notation : 8,3 /10 (scale)

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